La presse espagnole fait état d'un contrat d'armement signé entre le gouvernement espagnol et le royaume du Maroc. Le contrat en question porte sur la dotation des forces armées royales marocaines d'un lot de 1200 blindés livrables en une seule traite. Jamais depuis la cessation des hostilités au Sahara occidental entre l'armée marocaine et les forces sahraouies intervenue en 1991 pour donner une chance à la diplomatie sans succès le Maroc n'avait ressenti un tel besoin de surarmement que rien ne pouvait justifier. Ni la situation militaire au Sahara occidental, qui n'a pas changé sur le terrain, ni la situation géopolitique et géostratégique dans la région qui pourrait pousser le Maroc à redouter une attaque extérieure d'un pays voisin qui n'existe que dans l'esprit des dirigeants marocains. L'armée sahraouie n'a en effet jamais violé la trêve à laquelle elle a souscrit et ne nourrit pas de velléités guerrières comme elle l'a prouvé au cours de toutes ces années où elle a donné la preuve de son attachement à la paix. L'Algérie, pour sa part, a d'autres préoccupations et d'autres défis à affronter sur le front du développement que de comploter dans le dos du peuple marocain frère auquel nous lie une histoire et un destin communs. Quelle signification alors doit-on donner à ce bruit de bottes marocain qui intervient paradoxalement dans un contexte politique où le Maroc se lance dans une opération de marketing politique en quête de soutiens extérieurs à son projet fumeux d'autonomie du Sahara occidental dans le cadre de la souveraineté marocaine. La diplomatie marocaine s'est, en effet, subitement mise en branle cette semaine pour défendre ce dossier à Paris où une délégation marocaine avait été reçue la semaine dernière, suivie hier d'une autre escale à Madrid. Il faut reconnaître que c'est là une bien curieuse façon de la part du palais royal marocain de promouvoir la paix et la sécurité dans la région à l'ombre des chenilles des blindés acquis au détriment des coupes sombres opérées dans les budgets sociaux en mal de ressources. Le Maroc se prépare-t-il à une attaque surprise et imminente contre le Polisario pour mieux négocier et imposer son plan d'autonomie au Sahara occidental avec la bénédiction tacite de la France et de l'Espagne, ses deux principaux sponsors politiques ? La menace est à prendre très au sérieux. Les Sahraouis en sont d'ailleurs parfaitement conscients. Dans un communiqué rendu public hier, le gouvernement sahraoui a vivement dénoncé la conclusion de cet accord militaire qui aura fatalement des « conséquences diplomatiques et militaires ». Les observateurs n'ont pas manqué de faire le lien entre la décision de Rabat de renforcer ses capacités militaires offensives et l'impasse politique dans laquelle se trouve le dossier du Sahara occidental du fait des tergiversations et des volte-face marocaines. C'est la diplomatie de la canonnière : le Maroc, qui a lamentablement échoué depuis toutes ces années dans sa vaine tentative de susciter l'adhésion de la communauté internationale autour de son projet d'expansion territoriale, retrouve ses instincts grégaires et guerriers mis au service d'un obscur projet politique : l'autonomie destinée à consacrer le fait accompli de l'occupation.