Près d'un million d'Algériens vivent dans un état de pauvreté absolue chronique. Ils sont d'autant plus en attente d'élans de générosité et de solidarité que le mois de Ramadhan est proche. Si le constat de la précarité est devenu récurrent, il est à observer que l'effectif des populations démunies a pris de l'ampleur. Le moins que puissent faire les pouvoirs publics est de se placer au relais de cette demande de solidarité largement couverte, d'autre part, par nombre d'organisations non-gouvernementales – notamment des associations sportives ou caritatives – qui agissent dans le circuit de la restauration gratuite. Le mois de Ramadhan est en effet générateur de dépenses auxquelles ces nombreuses familles sans aucune ressource ne peuvent pas faire face. Comment pourrait-il en être autrement lorsque d'autres familles assurées d'un revenu stable parviennent à boucler leur mois tant elles subissent la pression du coût de la vie. Ces familles-là estiment avoir à peine la tête au-dessus de l'eau car leur budget, déjà relatif, est grevé par des augmentations qui affectent des produits stratégiques comme l'huile ou la pomme de terre, voire aussi le sucre dont les foyers font grand usage durant le mois de Ramadhan. Mais c'est forcément vers les plus pauvres de nos concitoyens que se tourne l'intérêt, dans la mesure où ils n'ont même pas la capacité de se soucier de la sarabande des prix. Il est donc raisonnable de penser à eux dès à présent, comme le font d'ailleurs des institutions officielles ou des ONG qui auront à cœur de servir des repas chauds à des centaines de milliers de nécessiteux pendant tout le mois de Ramadhan. Il n'y a que cette alternative qui s'impose faute d'avoir amené ces familles installées dans la précarité à changer de statut par l'accès au travail. La société dans son ensemble, mais aussi chaque citoyen en mesure de faire acte de solidarité, est responsable face à ces situations de dénuement dont il est difficile de croire qu'elles sont acceptées par ceux qui les subissent. Personne ne peut faire délibérément vœu de pauvreté et de se placer à la charge de la collectivité. Au demeurant, ce n'est pas une situation propre à la société algérienne. Des pays réputés économiquement prospères ont vu se développer des chaînes de solidarité. La précarité n'est jamais un choix, elle est une circonstance sociale dont nul individu ne peut s'estimer non concerné. En fait, ce sont les couches dites moyennes qui sont exposées au risque de la pauvreté tant il devient difficile pour elles d'être en équilibre économique. Il serait illusoire, dans ce sens, de penser que la précarité serait effacée par une seule décision politique qui aurait un caractère coercitif. Il est par contre légitime que collectivités locales et réseaux associatifs prennent la mesure de ce phénomène de la précarité que la société ne doit pas vivre comme une fatalité immuable, alors que les réflexes de la solidarité, quasiment enracinés dans les traditions algériennes, maintiennent vivant le lien social. Et davantage encore, le lien humain.