N'ayant apparemment jamais été renouvelée, la masse des billets de banque de 200 DA, mise en circulation il y a un peu plus d'un quart de siècle, est dans état des plus déplorables. Malodorants, sales, usés, déchirés, griffonnés, écornés, scotchés, la plupart de ces billets partent en lambeaux ou s'effritent dès qu'on les touche. Certains sont tellement usés qu'ils ne supportent même pas le passage dans l'une de ces machines à compter les billets automatiques que l'on retrouve dans les banques ou les bureaux de poste. Ils se désagrègent au contact des dents de caoutchouc, pourtant très souple, qui les font défiler. L'état de dégradation de ces billets a poussé certaines administrations pourtant publiques, à l'image de Sonelgaz, à se permettre le luxe de les refuser aux citoyens qui les présentent en paiement de leurs factures. Par contre, le citoyen, lui, quand il se présente à un guichet de poste ou de banque et qu'il est payé avec ces encombrantes et épaisses liasses de billets crasseux, ne peut pas se payer le luxe de refuser de les prendre. Dans la wilaya de Béjaïa, plusieurs citoyens ont pris contact, ces derniers temps, avec notre rédaction pour signaler des cas de commerçants et d'administrations qui refusent d'encaisser ces billets. Contactés, des administrations et des commerçants avancent le fait qu'ils se sont, à plusieurs reprises, retrouvés avec des billets scotchés au milieu et provenant de deux billets différents. Les banques refusant d'échanger les billets quand il s'agit de moitiés frauduleusement accolées. Il y a là, tout de même, un manque à gagner en plus des tracasseries administratives liées à leur remplacement. Bref, la masse des billets complètement dégradés étant en constante augmentation, les banques, les administrations et les citoyens se renvoient la balle de la responsabilité en évitant que de tels billets leur restent entre les mains. Etant donné qu'il s'agit de la monnaie nationale qui est, comme chacun le sait, un symbole de souveraineté qui renvoie directement à l'image du pays ou de la nation entière, tout autant que le passeport ou le drapeau, est-il permis de laisser en circulation de tels chiffons ? Peut-on raisonnablement laisser sur le marché monétaire des billets aussi vieux et aussi usagés ? Si la décence ne nous permet pas de nous comparer aux Européens, bien, trop en avance sur nous dans tous les domaines pour dire que le billet de banque algérien devrait craquer entre les doigts comme l'euro, on devrait au moins prendre exemple sur nos voisins marocains et tunisiens dont les billets sont presque toujours flambant neufs.