En l'an 1111 après la naissance de Zedjiga, on raconte que dans les plaines du Mor, dans une contrée qui sentait bon le Sanibon, vivait une communauté heureuse et paisible, qui ne se battait que le week-end et jouait à la marelle le reste du temps. Organisée en tribus plus ou moins rivales qui ne se rencontraient que dans les salons de thé à la neutralité avérée, leur terre était grande et vaste, et de ce fait subissait des invasions depuis les époques les plus anciennes. Tout le monde y passa, les grands, les petits, les gros, les blancs et les moins blancs. Tous les peuples du monde, qui pour y récupérer du blé, qui pour chercher une amante, qui pour installer une station essence ou simplement pour passer des vacances les pieds dans l'eau et peindre de jolis tableaux orientalistes. Le pays souffrit tellement que quand il recouvra enfin son indépendance, il s'endormit d'un sommeil réparateur, ce qui profita à une bande de requins marteaux pour s'emparer de ses richesses en noyant tous les opposants. Les habitants, déçus, ne pouvaient même plus jouer à la marelle. Ils restèrent enfermés dans leurs chambres quand ils s'aperçurent que leurs dirigeants n'avaient pas besoin d'eux. Ils importaient des Chinois pour construire les machines et importaient des Américains pour les faire marcher. Et revendaient ensuite le produit des machines aux étrangers, engrangeant par là de solides bénéfices. Un jour que les habitants sortirent de leurs chambres pour demander un peu de respect, les requins marteaux offrirent des algues vertes au peuple. Mais rien n'y fit et une longue série d'émeutes débuta. Les requins décidèrent alors d'organiser des élections sous l'eau dont les résultats furent illisibles. Mais le peuple ne trouva rien à redire et se calma. Depuis, et devant les défaites à répétition de l'équipe de football, la marelle devint le sport national.