Rien ne va plus au sein d'El Islah. Quelques semaines seulement avant la tenue de son congrès, prévu pour les 29, 30 et 31 décembre, le parti de Abdallah Djaballah vie une crise interne qui ne dit pas son nom. Après les soubresauts du mois de Ramadhan, soldés par la démission de cinq membres du bureau national, les cadres du parti ont fait appel à l'arbitrage de la haute instance dirigeante, le conseil consultatif (CC), composé de 108 membres. Ce dernier s'est réuni jeudi dernier au siège national du parti, à Alger, sans la présence de son président, Mohamed Boulahia, ainsi qu'une vingtaine de membres. Mohamed Boulahia a, selon un communiqué transmis hier à notre rédaction, informé, le jour même, l'ensemble des membres que « la session extraordinaire qui devait se tenir aujourd'hui (jeudi 18 novembre, ndlr) a été reportée à une date ultérieure qui sera annoncée lorsque les conditions de sa tenue seront réunies, tout en gardant la session ouverte ». Mais la décision du président du CC ne semble pas avoir eu l'effet souhaité, car 86 sur les 108 membres ont pris part à la réunion présidée par le vice-président du conseil, Djillali Boumediène. C'est du moins ce qu'indique la liste de présence qui nous a été envoyée, portant la griffe du CC et la signature du « nouveau président », Djillali Boumediène, proche de Djaballah. Il est décidé, à l'issue de cette session, de retirer la confiance à la fois au président du CC et aux cinq membres du bureau national ayant démissionné en octobre dernier, à savoir Djamel Benabdeslam, Abdelallah Lacheheb, Omar Qoreïchi, Mohamed Marzouki et Bachir Khelfi. Ces derniers seront traduits prochainement devant la commission de discipline. Djillali Boumediène a été élu, par la même occasion, président du CC. Autre décision : le remplacement des membres du bureau national auxquels on a retiré la confiance. Les membres réunis en session extraordinaire ont lancé un appel en direction des militants et cadres du mouvement pour se mobiliser et s'attacher à la conduite du parti en travaillant main dans la main afin de pouvoir « déjouer tout complot ou tentative de déstabilisation visant la direction actuelle du parti, à sa tête le cheikh Abdallah Djaballah ». En revanche, la partie dissidente a qualifié la réunion d'« illégale », d'autant plus que le président du conseil a « reporté » la session extraordinaire prévue pour ce jour-là. M. Boulahia, qui s'est réuni avec ses « vice-présidents » jeudi soir, a dénoncé le « travail parallèle qui a été concocté en dehors du cadre légal de cette instance ». Selon les termes du communiqué signé par M. Boulahia, le bureau national est gelé et la préparation du congrès est confiée à une commission nationale issue du CC. Il considère également que toutes les « démarches » entreprises auparavant sont invalides et annulées. Pour les dissidents, Abdallah Djaballah veut organiser un congrès « sur mesure » qui aboutira nécessairement à sa reconduction à la tête du mouvement, piétinant la volonté de la base militante et mettant de côté les principes directeurs d'El Islah. Ainsi, le divorce semble être consommé entre le « groupe des cinq » et les partisans du cheikh Djaballah. Le président d'El Islah a déjà vécu une mauvaise expérience avec son ancien parti, Ennahdha, duquel il a été éjecté à la veille de l'élection présidentielle de 1999.