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Manz-Christ Gerlinde. Porte-parole du gouvernement de la principauté du Liechtenstein « Le discrédit jeté sur nos banques est une rumeur internationale »
Manz-Christ Gerlinde, porte-parole du gouvernement du Liechtenstein, ne possède pas de parcours politique et n'est issue d'aucune organisation politique du Liechtenstein. Elle a été sollicitée de son Autriche natale pour donner un nouveau souffle à la communication gouvernementale jugée par le prince quelque peu sclérosée face aux défis qu'impose la mondialisation. Devant les attaques venues de l'extérieur qui donnent une image négative des activités fiduciaires et bancaires dans la principauté, Mme Gerlinde en diplomate d'expérience qu'elle a été ne manque pas de faire dans la dentelle dans l'entretien qui suit. Parlez-nous du système politique actuellement en vigueur au Liechtenstein. Quelle est précisément le rôle du prince ? Le prince n'a pas seulement un rôle représentatif ou honorifique comme c'est le cas dans d'autres pays, mais il se pare d'aptitudes mesurément politiques puisqu'il est, selon l'expression consacrée, le stratège qui projette le devenir du pays sur le futur, sur les générations à venir. La famille princière est donc en permanence en immersion dans une réflexion et des décisions engageant le Liechtenstein dans les défis contemporains, à la manière d'un commandant de navire appelé à mener son bateau et ses passagers à bon port. C'est le prince qui a su convaincre son peuple à adhérer en 1990 à l'ONU et le temps lui a donné raison. C'est dire que le prince régnant est porteur d'idées novatrices. Il s'attelle à l'heure actuelle à jeter les bases d'un mode de développement original de manière à sécuriser durablement la prospérité du pays en favorisant l'émergence d'un bassin de haute technologie à Vaduz, la capitale. Cela nous permettra de fondre en un seul tenant nos systèmes d'enseignement, de recherche technologique et fixer en même temps notre jeunesse sur son sol. En ce qui concerne le gouvernement, il est chargé de gérer les affaires publiques et quotidiennes. Il est actuellement composé de cinq ministres. Chaque ministre a en charge trois départements au minimum. Par exemple, vous entendrez parler, au cours de votre séjour chez nous et sans que cela doive vous étonner, du ministre des Affaires étrangères, de la Culture et de la Famille. Le chef du gouvernement, en plus de sa charge de chef de l'exécutif, est en même temps ministre des Finances, de la Construction et des Biens publics. Il existe aussi un ministère jumelé de la Justice, des Affaires économique et des Sports. C'est le parlement qui élit les ministres et le prince les confirme. Deux grands partis politiques opposent dans la compétition électorale leur conception idéologique moderniste du pouvoir mais gardent toutefois un pied dans la monarchie. Quels avantages tire la principauté de son statut particulier au cœur de l'Europe ? Etes-vous réellement le centre de l'Europe ? Oui, du moins géographiquement. Nous avons intégré les directives et les recommandations de l'Union européenne dans notre législation et avons ratifié le traité de Schengen. Nous comptons rallier l'UE en 2009. Notre statut est pour le moment idéal et le Liechtenstein compte bénéficier du même confort lorsque nous serons membre de cette organisation. Par nos potentialités, c'est une ambition légitime que d'aspirer à être un centre actif et attractif tant économique que politique. Nous avons reçu récemment à Vaduz le Premier ministre autrichien pour un échange de vues et nous sommes sur la même longueur d'onde. Est-il vrai qu'il y a autant d'ambassades du Liechtenstein à travers le monde que de maisons à l'intérieur de la principauté ? Quels sont les grands axes de la politique extérieure du gouvernement ? Je vois que vous plaisantez. Nous avons en tout huit représentations diplomatiques (Autriche, Suisse, Allemagne, Etats-Unis ), dont deux à Genève (ONU et multilatérale), une à Bruxelles (Union européenne) et une autre aux Nations unies à New York. Malgré notre petit espace, nous sommes très ouverts et voulons être des partenaires constructifs en offrant une plateforme de dialogue. Modestement, nous n'avons aucun intérêt ni conflit stratégique avec une grande puissance et jouissons de la sympathie de pays importants. Par exemple, notre ambassadeur a été élu à la vice-présidence du groupe de travail portant sur le projet de réorganisation du Conseil de sécurité de l'ONU. Ne pas s'enfermer, être ouvert au monde est un atout à exploiter pour le Liechtenstein s'il veut survivre à la globalisation. Vous êtes installé depuis cinq ans au Liechtenstein, ce qui ne vous a pas empêché d'être le porte-parole de ce gouvernement. Est-il aussi aisé aux étrangers de s'intégrer dans cette principauté ? Je suis autrichienne d'origine et, au terme de mes études de sciences politiques et une expérience dans la vie professionnelle, j'ai reçu une offre du gouvernement pour être son porte-parole. C'est peut-être là une forme de « recrutement » qui prête à sourire sous d'autres cieux. Mais le gouvernement, en relation avec le prince régnant, cherchait dans le cadre de la globalisation à prôner une ouverture en matière de communication internationale. Diplomate de carrière, spécialisée dans les relations internationales, je suis donc venue pour animer ce nouveau concept et donner l'image d'un pays jeune, dynamique, doté d'idées modernistes, novatrices, afin de développer une image positive du Liechtenstein. Pour s'installer ici comme ce fut mon cas, il est aisé de le faire si on parle couramment allemand et si on est imprégné d'une culture germanophone globale. Nous sommes accueillants avec les investisseurs. Mais il faut reconnaître qu'il est plus facile pour d'autres catégories d'avoir un permis de travail qu'un permis de séjour. Sur les 30 000 personnes qui travaillent au Liechtenstein, un tiers seulement y réside. Les deux autres tiers logent soit en Suisse, soit en Autriche voisines. Nos services octroient en moyenne une cinquantaine de permis d'installation par an. Il est généralement admis que le Liechtenstein est un paradis fiscal pour les revenus mal acquis. Qu'avez-vous à répondre à ces rumeurs ? Et pourquoi avoir adopté comme monnaie nationale le franc suisse ? En 1924, il a été décidé d'abandonner la couronne déclinante de la monarchie austro-hongroise au profit du franc suisse pour des commodités liées au contexte politique et social de l'époque. Je ne pense pas qu'il y eut d'autres motivations que celles liées au réalisme économique et financier. Par ailleurs, comme vous le dites, l'image véhiculée faisant état d'un paradis fiscal au sein du Liechtenstein et le discrédit qu'on tente de jeter sur nos banques n'est qu'une rumeur internationale. Le Liechtenstein a des règles strictes en matière de contrôle et de provenance des fonds. Nous avons intégré et respecté toutes les directives européennes en la matière, celles de l'OCDE et de l'ONU. Nous n'acceptons donc pas les fortunes mal acquises. Nos banques sont attractives, car nous proposons des taux très bas par rapport à d'autres banques du continent et offrons en parallèle des produits financiers spécifiques et des « spécialités » bien de chez nous (les solutions boutiques par exemple). Oui, mais il semble que nombre de fraudeurs utilisent les filières de fondations caritatives fictives et autres ouvertes au Liechtenstein pour blanchir les revenus soustraits au contrôle fiscal de leur pays d'origine... Je ne sais pas de quoi vous parlez. Votre PIB place votre pays aux premières places par tête d'habitant. Vous considérez-vous comme un pays riche ? Non, pas riche en finances quantifiables mais plutôt riche en qualité de vie. Vous le constatez vous- même n'est-ce pas, notre richesse c'est la nature alentour et la sécurité. Nous avons une petite prison mais vide de délinquants. Le dernier délit majeur remonte à sept ans. Il y a certes de petits délits mineurs, mais ce n'est pas grand-chose. Connaissez-vous l'Algérie ? Quelle idée vous en faites-vous ? Non malheureusement, je n'ai pas eu l'occasion de visiter votre pays. C'est, j'imagine, complètement différent d'ici. Avec le Sahara, ça doit être grand, lumineux et un horizon sans fin qui ne peut que fasciner. Chez nous, notre horizon arrête notre regard à cette deuxième montagne qui nous sépare de l'Autriche et de la Suisse. Nous nous sentons bien dans notre petit cocon, comme vous devez bien vous sentir dans votre immensité.