Il s'agit pour eux de faire le bilan des activités judiciaires et financières de l'institution, mais aussi celui de la nouvelle application informatique, entrée en vigueur en janvier 2007, pour une gestion informatisée des dossiers judiciaires. Ainsi, durant les trois premiers mois de l'année passée, 20 000 affaires ont été traitées avec la nouvelle application, parmi lesquelles 790 relèvent de la chambre criminelle, 8919 de celle des délits, 1081 du civil, 2540 du social, 678 du statut personnel et 685 du maritime. Ces affaires sont passées à 61 000 en juin 2007. Au 19 avril 2008, le nombre des affaires informatisées a atteint 147 457, parmi lesquelles 106 210 relèvent du pénal, 41 247 affaires civiles. Néanmoins, 23 766 dossiers ne sont pas encore traités. Pour l'orateur, « le volume de travail est énorme vu le nombre d'affaires qui arrivent à la Cour suprême, mais l'informatisation de toutes les étapes de la gestion judiciaire est en très bonne voie ». L'ouverture du débat a permis de mettre en relief les difficultés que rencontrent les magistrats dans leur travail judiciaire. Beaucoup ont soulevé la « nécessité d'unifier la qualification et de la maîtriser ». Un magistrat va jusqu'à proposer une inspection pour contrôler la qualité des arrêts, ce qui a provoqué le courroux de la salle. « Les décisions sont souveraines et doivent refléter la conviction des magistrats. Nous n'avons pas besoin d'une inspection pour contrôler les décisions du juge, pour peu qu'elles soient bien argumentées », a répondu Kadour Berraja, premier président de la Cour suprême. Le procureur général près la Cour suprême a, pour sa part, tenté d'expliquer certaines défaillances ou erreurs dans les arrêts, en rappelant aux conférenciers les conditions « de recours aux greffiers non formés recrutés dans le cadre de l'emploi des jeunes ». Il a interpellé les magistrats sur l'importance de la correction des arrêts qui souvent, selon lui, comportent de nombreuses erreurs. D'autres juges ont, pour leur part, appelé à harmoniser la jurisprudence pour la rendre « plus uniforme » et éviter les contradictions, « y compris au niveau de la même chambre ». « Une tâche complexe » Certains intervenants ont proposé comme solution de revenir aux arrêts des chambres mixtes, alors que d'autres ont estimé que les doyens des présidents de chambre sont les plus habilités à conserver la jurisprudence. « Tous les membres des chambres doivent s'en référer pour ne pas tomber dans les contradictions ou encore aller vers des sections spécialisées. » D'autre part, les participants ont fait état de difficultés à s'informer sur les nouvelles dispositions du code de procédure pénal, entrées en vigueur récemment. « En attendant la publication du nouveau code, des réunions vont être tenues pour expliquer les nouvelles dispositions », a répondu M. Berraja. A la fin des travaux, le président de la chambre délictuelle a mis l'accent sur la difficulté de juguler tout le volume du travail qui arrive à son niveau et qui lui « donne le vertige », a-t-il déclaré. « Recevoir annuellement une moyenne de 93 000 dossiers et les traiter relève de l'impossible. Avec la soixantaine de magistrats, si nous voulons passer de 18 000 dossiers examinés annuellement à 30 000, il nous faut trois longues années pour terminer. C'est pour vous dire la complexité de notre tâche. Nous sommes dans un tunnel dont le bout n'apparaît jamais », a-t-il noté. A la fin, un conseiller a pris la parole pour interpeller le premier responsable de la Cour suprême sur la prise en charge médicale des magistrats. « Les arrêts cardiaques sont devenus notre hantise. Récemment, un juge est mort à l'hôtel El Aurassi à la suite d'un malaise cardiaque et n'a pu être sauvé faute d'ambulance. Un autre a succombé à l'aéroport, et j'en passe. Nous cotisons aux œuvres sociales, mais nous ne savons pas où part cet argent. Nous voulons juste que nous bénéficions de prises en charge dans des cliniques spécialisées », a déclaré un conseiller. M. Berraja a tenu à expliquer qu'une convention a été signée entre le ministère de la Justice et celui de la Défense pour permettre à tous les magistrats de se faire soigner dans les hôpitaux militaires, ajoutant que « des équipes médicales dotées d'ambulances sont disponibles au niveau de la Cour suprême et à l'hôtel des magistrats et qui, selon lui, assurent 24h/24 le service ». Avant de clore les débats, le premier président a tenu à rappeler l'importance « de l'uniformité des arrêts et de leur argumentation », tout en promettant que tous les points soulevés seront pris en compte, en annonçant qu'une commission sera installée pour les étudier.