L'Assemblée populaire nationale (APN) est bloquée. Le constat émane du groupe parlementaire du RCD qui, au bout de la première année de la 6e législature, relève d'innombrables dysfonctionnements. Du refus de la mise en place de commissions d'enquête à l'absence de réponses des ministres aux questions orales des députés du parti en passant par l'incapacité de l'administration de l'APN à déterminer le nombre exact de personnes qu'elle emploie, le président du groupe, Boubekeur Derguini, y livre un constat des plus critiques. « Le fonctionnement de l'Assemblée populaire nationale est entaché d'irrégularités constantes », affirme-t-il dans une conférence de presse animée hier au siège du groupe au sein de l'APN, conjointement avec Noureddine Aït Hamouda, vice-président de l'Assemblée. M. Derguini énumère, dans la déclaration préliminaire lue devant les journalistes, quelques irrégularités sans pour autant « en épuiser la liste ». Il s'agit notamment du non-respect de la loi en matière de traitement des questions orales posées par les députés. « Le délai moyen de réponse, je dis bien moyen, et lorsque réponse il y a, est de trois mois, alors que la loi prévoit un délai d'un mois », précise-t-il, citant quelques exemples dont la question de la députée du parti Lila Hadjarab sur les incendies, posée en été 2007, et qui n'a eu de réponse qu'en hiver 2008. Il évoque également la question posée par le député Aït Hamouda sur les dépouilles des colonels Amirouche et Si El Houes et sur le dossier des faux moudjahidine et à laquelle le ministre concerné n'a apporté, 5 mois plus tard, aucune réponse. « J'ai interdit au ministre des Moudjahidine de venir à l'APN pour répondre à d'autres questions », lâche M. Aït Hamouda, sur ton ironique, soulignant que le ministre en question ne pourra pas répondre à d'autres questions tant qu'il n'a pas fourni de réponses à la sienne. « Je vais la laisser suspendue », indique-t-il encore, assurant connaître ceux qui étaient responsables de la séquestration des dépouilles de Amirouche et de Si El Haouès. « Ce sont Boumediène, Chabou et Ben Chérif », accuse-t-il, insistant sur Ben Chérif, toujours en vie. M. Aït Hamouda enchaîne sur la question des faux moudjahidine, qui a fait couler beaucoup d'encre, en vain, tout rappelant le chiffre déclaré par le ministre en charge du secteur, à savoir 10 000 personnes. Blocage à l'APN « S'il y a 10 000 faux moudjahidine, il doit y avoir 30 000 faux témoins. Ceux-ci doivent répondre (de leur acte) devant la justice », clame-t-il. Autre abus dénoncé par le groupe parlementaire du RCD : le traitement des demandes de constitution de commissions d'enquête parlementaires. M. Derguini rappelle ainsi les quatre initiatives du RCD qui ont été rejetées. La première, explique-t-il, visait à faire connaître les conditions de traitement des candidatures par l'administration aux élections locales de novembre 2007. La seconde commission est relative « aux événements criminels » de Berriane qui n'a pas eu de suite officielle, et ce, à ce jour. « Pis, le bureau de l'APN a tenté de récupérer et de dévoyer la démarche par une initiative clandestine de création d'une commission d'information partisane, car limitée aux députés de la coalition gouvernementale, commission dont les résultats restent tous aussi clandestins », fait-il remarquer. La troisième concerne les émeutes de Chlef et la 4e et dernière commission d'enquête initiée a concerné la dilapidation du patrimoine archéologique national, en général. « Pourtant, le bureau de l'APN nous reprochera de localiser à une région (Skikda ?) notre problématique, à laquelle il nous invitera à donner un « caractère plus national » », relève-t-il, sur un air d'étonnement. M. Derguini estime qu'il y a volonté de « contenir » et de « bloquer » les initiatives émanant des députés du RCD. « Cela, selon lui, est arrivé à tel point qu'ils ne montrent pas leur visage à la télévision lorsqu'ils interviennent dans les débats. » Selon lui, le pouvoir démontre par là une fois de plus que la seule et unique fonction qu'il tolère au Parlement est « celle d'endosser toutes ses dérives, à l'image de la révision constitutionnelle, qu'il projette de commettre contre le pays ». M. Aït Hamouda affirme cependant qu'aucun texte portant révision de la Constitution n'a été déposé sur le bureau de l'APN. Face à cette situation de « blocage » de l'APN, le groupe parlementaire du RCD interpelle les instances parlementaires internationales, dont l'assemblée parlementaire euroméditerranéenne, l'assemblée parlementaire de la méditerranée et l'assemblée parlementaire du conseil de l'Europe. « Cette situation doit cesser », martèle M. Derguini, qui exige que l'Assemblée puisse jouir de toutes ses prérogatives constitutionnelles.