"Mon Dieu, qu'on puisse voir Bachar al-Assad bientôt pendu ou brûlé, renversé ou arrêté et humilié": en pèlerinage à La Mecque, des Syriens ont laissé éclater leur colère contre Damas dont les troupes sont au coeur du conflit sanglant qui secoue leur pays. "Que Bachar connaisse le même sort que (Mouammar) Kadhafi", scandent des dizaines de fidèles, faisant référence au dirigeant libyen tué par des rebelles qui s'étaient soulevés contre son régime l'an dernier. Autour d'eux, de nombreux fidèles brandissent des drapeaux de la révolution syrienne et scandent des slogans hostiles au régime de Damas, au moment où des fidèles musulmans venus du monde entier accomplissent le rituel de lapidation de trois stèles symbolisant Satan dans la vallée de Mina, avant d'achever leur pèlerinage. "Parlez de nous au monde entier! Nous étions assiégés en Syrie, à Homs. Ils ont démoli nos maisons, alors nous avons fui en Arabie saoudite", lance, en larmes, une vieille femme. "Des chars étaient postés juste à côté de notre maison. J'étais seule avec ma fille, alors nous avons fui", raconte-t-elle. "Je souhaite la victoire de la Syrie. J'espère voir le drapeau de la Syrie libre hissé dans le pays et que tous les réfugiés et les sans-abri rentreront chez eux", poursuit-elle. Face à la répression sanglante des troupes qui tiraient sur des manifestants pacifiques, le soulèvement populaire lancé en mars 2011 en Syrie s'est militarisé au fil des mois. Depuis, plus de 35.000 personnes ont péri dans le pays, selon une ONG. Les autorités syriennes avaient annoncé en septembre qu'elles n'enverraient pas de ressortissants cette année au pèlerinage annuel à la Mecque, faute d'accord avec Ryad. Mais l'Arabie saoudite a dit avoir accordé 10.000 visas de hajj aux réfugiés syriens au Liban, en Turquie et en Jordanie. La majorité des Syriens en pèlerinage arborent le drapeau des rebelles, portent des bracelets ou des foulards aux couleurs de la révolution. Parmi eux, "des résidents, arrivés (en Arabie saoudite) avant le hajj", et d'autres "venus avec des visas de visite", selon Omar Noman en charge de dizaines de ces pèlerins. "Leur situation financière ne leur permettant pas de payer un hôtel, nous dormons sur des nattes dans la rue", ajoute-t-il. "Chacun parmi nous a souffert (de la guerre), a perdu un parent ou a eu une maison détruite. C'est pourquoi nous maudissons Bachar". Mohamed al-Masri, pèlerin syrien, dit effectuer le hajj cette année "à la mémoire des martyrs de la Syrie". "Ils ont brisé nos coeurs, détruit nos mosquées, et massacré nos enfants", se lamentent plusieurs de ses compatriotes en implorant Dieu de les venger. "La plupart des gens prient pour notre liberté", affirme un autre Syrien, Haitham al-Rifaie, alors que des fidèles de différentes nationalités expriment leur soutien à leurs coreligionnaires syriens. L'Arabie saoudite, très critique du régime de Damas, soutient la rébellion. Vendredi, l'imam de la Grande mosquée de La Mecque, cheikh Saleh Mohamed Al-Taleb, a appelé la communauté internationale à prendre des mesures "pratiques et urgentes" pour mettre fin au bain de sang. "Le monde doit assumer sa responsabilité face à la poursuite de cette catastrophe douloureuse", a-t-il dit, ajoutant dans son sermon de la fête d'Al-Adha: "La responsabilité est plus grande pour les Arabes et les musulmans qui doivent soutenir d'une seule voix l'opprimé contre l'oppresseur".