Depuis quelques mois, c'est le mot d'ordre qui circule dans les milieux hospitaliers et autres concernant le « kéfir de lait ». Selon les définitions fournies par certains sites sur Internet, ce produit est, en fait, une boisson issue de la fermentation du lait. « Le kéfir de lait est obtenu à partir de grains de kéfir qui se présentent sous diverses formes et ressemblent en général à de petites boules couvertes de boursouflures. Le grain est composé de bactéries et levures actives ancrées dans une matrice de polysaccharides et de protéines de lait. Ces grains, quand ils grossissent, finissent par ressembler à un petit chou-fleur. Le kéfir de lait ne se mange pas. On ne consomme que le lait fermenté », disent-ils. Ils précisent aussi que c'est un produit préventif contre certaines pathologies mais en aucune manière il ne peut être curatif. En dépit de ces allégations, tout le monde en consomme. Même les malades dans les hôpitaux. C'est le cas d'ailleurs des cancéreux au niveau du CPMC (Centre Pierre et Marie Curie) au CHU Mustapha Pacha (Alger) et le CAC (Centre anticancéreux) au CHU Franz-Fanon (Blida). « On me l'a recommandé depuis quelque temps déjà, mais ce n'est que maintenant que j'ai pu m'en procurer. D'ailleurs, c'est une autre malade qui m'en a donné », raconte Mokhtaria, une patiente souffrant d'une tumeur au cerveau. Se procurant les quelques « grains miracles », les patients font même la fermentation du lait au sein même des salles de soins. « Il suffit d'avoir des ustensiles (cuillère, verre et bouteilles) en plastique et du lait et le tour est joué », poursuit-elle, précisant qu'« il ne faut pas utiliser des outils en verre ou en aluminium ». Farida va jusqu'à affirmer que son état de santé s'est amélioré depuis qu'elle consomme le kéfir de lait. « Les bilans et les comptes rendus des scanners et IRM montrent des signes d'amélioration et de régression de la maladie », témoigne-t-elle. Comme Mokhtaria et Farida, ils sont de plus en plus nombreux à en consommer de ce breuvage miracle. C'est le cas de Hamid, souffrant d'un cancer du colon, il a remplacé l'eau par le kéfir de lait. Il dit d'ailleurs qu'il en consomme presque trois litres par jour. « Ma maladie est grave. Après deux interventions chirurgicales et des dizaines de séances de radiothérapie et chimiothérapie, le cancer est toujours là à me ronger. Alors, j'ai opté pour la médecine non conventionnelle. Peut-être, elle pourra m'apporter la guérison », déclare-t-il. Mais cette boisson a aussi des effets positifs sur d'autres maladies. « A en croire les dires des gens qui l'ont essayé, le kéfir de lait est aussi recommandé pour l'anémie, l'hypertension artérielle, les maladies cardiovasculaires... », explique une jeune femme rencontré au niveau du CPMC. Au niveau de ce centre, les malades ont même les coordonnées du fournisseur. « Il nous le vend à 300 dinars le litre », déclare Mohamed. Pour autant, ce produit est introduit dans les établissements de santé de manière frauduleuse. Selon un infirmier au CAC, « il est strictement interdit d'introduire de tels produits dans les hôpitaux et autres centres de santé. Malheureusement, nous ne pouvons pas contrôler les patients, ni les visiteurs », explique-t-il. Même sur le plan sanitaire, aucune étude n'a été menée sur le kéfir de lait en Algérie. Les autorités et le personnel de santé ignorent son impact sur la santé de l'individu. Dr Abdelouahab Bengounia, du CHU Mustapha-Pacha, explique qu'« il faut une étude approfondie sur ce produit et des observations pendant une durée bien définie pour connaître son impact sur la santé humaine ».