Cirta l'antique, Constantine « La cité royale » a toujours suscité l'imaginaire de ceux qui l'ont visitée. Grande dame du savoir, musicienne et aristocrate, Constantine se voit l'élue pour être la capitale de la culture arabe en 2015. A tout seigneur, tout honneur ! Narrer Constantine au passé, c'est raconter la médina à travers son âme, ses souffles de vie successifs et sa mémoire multiple. Constantine porte fièrement ses 2.700 ans, intriguant les voyageurs qui l'ont traversée et côtoyée depuis des siècles d'une part, par sa situation stratégique, sa disposition de cité forteresse et d'autre part, de par son mystère de ville suspendue « Blad el Houa », l'aérienne, la ville des passions autant de qualifiants que les géographes et autres écrivains ont consigné dans leurs écrits, pour les transmettre à la postérité et à l'histoire universelle. Parmi les illustres visiteurs de Constantine du début du XIe siècle et même bien avant cette date, l'histoire retient les noms d'El Bekri, Ibn el Hawkel, Ibn El Khaldoun, El Idrissi, Ibn Battûta, Léon l'Africain et Thomas Shaw. Elle suscite l'admiration tant par son opulence, son site imposant et monumental et pour être l'incomparable ville des ponts suspendus. El Bekri, historien arabe inspiré par le site, la décrit et la compare à un bateau porté par trois rivières qui traversent un ravin impressionnant. L'abîme qui s'incruste jusque dans la mémoire de Constantine ne peut être raconté sans retracer ses voies de passages aériens qui le dominent. On est en 1837. Le visiteur européen du XIXe siècle nouvellement arrivé, va à son tour essayer de déchiffrer les mots secrets, gravés sur les murs, empreints sur les pavés, tracés sur les cimaises mouvantes du temps. Tendant l'oreille, il essaiera de retenir la voix des générations qui ont traversé Constantine et qui ont parcouru ses rues inclinées. Conséquence de la topographie des lieux et qui ont fait une caractéristique de la Médina. Comme toutes les villes algériennes et bien au-delà, elle se raconte par ses trois portes, accès inévitables si l'on voulait s'y promener « Bab Ejdid », « Bab El Wad », « Bab El Djabya », sans oublier la légendaire « Bab el Qantara ». L'essor urbain de Constantine du XVIIIe siècle est tel que les Français et autres Européens qui la découvrent avec admiration, commencent leurs investigations sur cette période de régence ottomane. Constantine a vu son développement économique, urbain et artisanal prendre de l'essor grâce à la gouvernance des cinq beys qui se sont succédé, à savoir Hassen Bey Bou Kemia (1713-1736), Hassan Bou Hnek (1736-1754) et Hassan Bey Azreg Aïnou (1754-1756). Ce dernier dont le règne fut bref par rapport à ses prédécesseurs, la ville lui doit le développement de l'organisation des corporations des métiers. Il sera suivi de Ahmed Bey El Kolli (1756-1771) et de Saleh Bey (1771-1791), dernier Bey de Constantine, passé à la célébrité pour sa participation victorieuse contre les Espagnols à Alger et dont la renommée est chantée dans un long poème louant les mérites du Bey mort tragiquement. Les chroniques de l'histoire attestent de l'apport culturel, économique et religieux au cours de ces 5 beylicats qui propulsèrent la construction des édifices les plus illustres de Constantine à l'exemple de la mosquée de Sidi El Ahdar, la madrassa et la mosquée de Sidi Kattani, la Grande Mosquée et la mosquée Souk El Ghazi. On laissera l'un de ses illustres fils, en l'occurrence Malek Haddad, la chanter comme savent le faire les poètes : « On ne présente plus Constantine. Elle se présente et on la salue... Elle est ainsi chargée d'histoire... Son passé remonte aussi loin qu'il y a des hommes, qu'il y a même des phénomènes... Sur le Rocher on respire une atmosphère très particulière tissée d'histoire et de destinée humaine... ».