Le fossé se creuse entre les « laïcs » et les islamistes en Egypte. Aucun de ces derniers ne siège dans le gouvernement qui a prêté serment mardi soir devant le président intérimaire, Adly Mansour, en présence du Premier ministre Hazem Beblawi. Les Frères musulmans qui ont rejeté tout dialogue ou participation au nouveau pouvoir disent ne pas reconnaître cet exécutif de 35 membres, formé moins de deux semaines après la déposition du président Mohamed Morsi. Pour la première fois en Egypte, trois coptes et autant de femmes sont nommés ministres. « Nous ne reconnaissons ni la légitimité ni l'autorité de ce gouvernement », déclare Gehad El-Haddad porte-parole des Frères musulmans, réclamant le retour du président Morsi. Selon lui, les « Frères » qui refusent de « pactiser avec des putschistes », ne cesseront leur mobilisation qu'au retour à son poste « du premier chef de l'Etat démocratiquement élu » de l'histoire du pays. Al-Nour, le parti salafiste, réserve sa réponse sur un éventuel soutien au nouveau gouvernement. Déterminé à aller de l'avant, Adly Mansour qui a demandé au parquet d'ouvrir une instruction sur les circonstances de l'évasion Morsi et de 18 autres membres des Frères, invite les partis, y compris les Frères musulmans, à un dialogue et à une réconciliation nationale. Le Caire, qui a entendu lundi Bill Burns, le secrétaire d'Etat adjoint, appeler à l'apaisement, jugeant que « la première des priorités » devait être « de mettre fin à la violence (...) et de commencer un dialogue sérieux et soutenu entre toutes les parties », déroulé, hier, le tapis rouge pour Catherine Ashton, la chef de la diplomatie européenne. Comme l'Américain, elle a appelé à un « retour le plus rapidement possible à la transition démocratique ». Sur le terrain, la violence n'a pas cessé, notamment au Sinaï où la présence militaire égyptienne est limitée par le traité de paix avec Israël de 1979. Les attaques contre la police et l'armée se sont intensifiées depuis deux semaines dans cette péninsule. Mardi soir, six soldats et deux civils ont été blessés dans une attaque au lance-roquettes. Dans la région une question se pose : les Frères musulmans reviendront-ils ? Certains pays ont peur de voir leurs Frères devenir plus violents. D'autres redoutent que l'exemple égyptien ne donne un « second souffle » aux islamistes radicaux qui ne croient pas en le changement par les urnes, pour recruter.