Soumis à des pressions américaines, européennes et arabes sans précédent, Mahmoud Abbas cède. Le président de l'Autorité palestinienne annoncera aujourd'hui ou demain son «oui» à la reprise des négociations directes avec les Israéliens qui pourraient avoir lieu, selon Washington, «début septembre». Principal argument du successeur de Yasser Arafat qui n'exige plus la suspension des constructions israéliennes dans les implantations –condition sine qua non jusqu'à présent– pour justifier sa «décision» : les garanties offertes par le quartette (ONU, Etats-Unis, UE, Russie), un «machin» qui a été souvent absent sur la scène au Moyen-Orient. Selon Nabil Abu Rudeina, le porte-parole de la présidence de l'Autorité palestinienne, «il y a eu des progrès jusqu'ici» après la rencontre de dimanche soir à Ramallah, entre Mahmoud Abbas, et David Hale, l'adjoint de l'émissaire américain pour le Proche-Orient George Mitchell. En outre, dit-il, le quartette qui a invité Palestiniens et Israéliens à reprendre les négociations directes en vue de conclure un accord de paix dans les 24 mois qui permettra l'établissement d'un Etat palestinien «viable et démocratique», appellera dans un communiqué à l'issue de sa réunion début septembre, l'Etat hébreu à stopper ses activités de colonisation. La résistance des Palestiniens depuis des mois aux pressions américaines, arguant que le gouvernement israélien n'a pas l'intention de se retirer des territoires palestiniens occupés depuis la guerre des Six jours en 1967, aurait-elle été vaine ? L'Etat hébreu qui se frotte les mains après le «oui» de l'Autorité palestinienne refuse toujours d'entendre parler d'un prolongement du moratoire de 10 mois dans les implantations, après le 26 septembre, le calendrier du quartette et l'ordre du jour des pourparlers En attendant l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) qui se réunira, aujourd'hui, pour se prononcer sur ces négociations directes, Hamas et quelque onze mouvements palestiniens dont le Djihad islamique, le Front populaire et le Front démocratique, sont montés déjà au créneau. Ils exhortent Mahmoud Abbas à refuser ces pourparlers qu'ils qualifient de dangereux. Ces pourparlers visent, disent-ils, à «liquider les droits nationaux du peuple palestinien». Au mieux, avancent certains partis palestiniens, ces pourparlers qui devraient être subordonnés à la levée du blocus de la bande de Gaza, pourraient se tenir sous l'égide de la communauté internationale. Même le Fatah ne croit pas trop en ces retrouvailles avec l'Etat hébreu. Deux poids lourds du mouvement du président palestinien ont fustigé cette semaine ce retour aux discussions directes qu'ils qualifient de «désastreuses» et de «catastrophiques». «Pas un seul dossier n'a été réglé en 19 ans de discussions», reconnaît Ahmed Qorei, l'ex-négociateur en chef. La raison ? «Israël ne veut pas mettre fin à son occupation et permettre la création d'un Etat palestinien viable», dit-il. Marwan Barghouti, le leader Fatah emprisonné et Mohamed Dahlan, l'ancien homme fort de Gaza, s'opposent à ces pourparlers qui cautionnent l'abandon des conditions préalables palestiniennes pour la reprise des discussions avec Israël, directes ou indirectes. Confronté à une fronde, y compris au Fatah et à une opinion publique qui ne se fait aucune illusion sur la banqueroute du processus de paix, Abbas est pris au piège. Se soumettre au diktat de Washington, c'est aller vers son suicide politique et l'effacement de son mouvement de la carte politique aux prochaines élections. Suivre le «pouls de la rue palestinienne», c'est faire le jeu de Netanyahu et irriter Obama qui lui a promis de subir les conséquences, dont le retrait de l'aide financière. «Les Américains jouent l'intimidation pour que nous rejoignions de façon inconditionnelle et pour une durée indéterminée des négociations qui pourraient conduire nulle part», avoue Saeb Ereikat, le négociateur en chef de l'AP. Cruel dilemme. Selon certains observateurs, ce dilemme pourrait le forcer à démissionner.