Placé sous haute sécurité, le scrutin, qui a connu une « affluence certaine », a prévalu par un déroulement régulier du processus électoral et sans « aucun incident majeur », selon le commissaire en charge de l'organisation matérielle et logistique au sein de l'ANE (Autorité nationale des élections). Il s'agit à l'évidence d'un acquis majeur qui contraste avec les violences électorales qui ont marqué le référendum constitutionnel du 13 décembre 2015 présenté comme une première étape vers le retour à la stabilité. L'espoir revient dans un pays laminé par le règne sanglant des milices rivales de l'ex-Seleka majoritairement musulmane et anti-Balaka, à tendance chrétienne. « Honnêtement, on a fait un miracle dans un pays en guerre », a affirmé le général sénégalais Balla Keïta, chef militaire de la Minusca assurant en appui avec les forces de sécurités centrafricaines la sécurité du scrutin de toutes les attentes. C'est le cas notamment dans l'enclave musulmane du quartier PK-5, visé par des tirs de roquettes lors du référendum (5 morts) où le vote redouté a connu la même ferveur que dans l'ensemble de la capitale. Mais aussi, en province, où les localités Bouar, Berbérati, Bossangoa (fief des milices anti-balaka et du président renversé François Bozizé), Kaga Bandoro (aux mains de l'ex-Seleka), Bambari ou Ndélé, ayant subi la loi de la guerre tribale, ont vécu une journée électorale satisfaisante. Le vent du changement s'est levé sur la Centrafrique déterminée à réussir le pari démocratique. « On doit changer la destinée du pays aujourd'hui. Il faut cette fois que le suffrage du peuple ne soit pas détourné », commentait dans le 2e arrondissement de Bangui un administrateur civil Philippe Bodo. Cette participation populaire massive aux élections, plusieurs fois reportées en l'absence de conditions sécuritaires suffisantes, constitue en soi une victoire indéniable qui dépasse de loin la perception étriquée du verdict attendu dans plusieurs jours. Par-delà les « imperfections techniques (acheminement des bulletins dans plusieurs circonscriptions, le manque d'urnes et d'isoloirs dans certains bureaux), une alternative se dessine pour valider le choix des urnes, aux antipodes de la violence tribale. Les enjeux de la paix et de la stabilité y prédominent. L'un des favoris en puissance, l'ancien Premier ministre, Martin Ziguélé, estime que « les enjeux de ces élections, c'est la reprise en mains du destin de notre pays ». Il juge dès lors que « même s'il y a des imperfections, même si des bulletins des législatives n'arrivent pas ici ou là », la mobilisation des Centrafricains est vitale pour l'avenir et le redressement de leur pays qui affronte de graves problèmes économiques. Le candidat Abdoul Karim Méckassoua, plusieurs fois ministre, n'a pas manqué de rappeler à la presse au quartier martyr de PK-5 qu'« il y a de cela quelques jours, on nous tirait dessus ». Le troisième favori, l'ancien Premier ministre Anicet Georges Dologuélé, veut, quant à lui, en finir avec « la souffrance des Centrafricains ». Il y a donc unanimité dans ce « souffle nouveau » rêvé par les Centrafricains et porté par la volonté de consolider « le premier pas vers la paix ». Comme à M'Poko dressant l'urne du rassemblement des familles chassées de leurs maisons en décembre 2013.