« Tamentit renfermait 365 ksars et 365 foggaras, aujourd'hui il ne reste que 5 ksars et 7 foggaras », regrette Mohamed Abdellah Moussaoui, président de l'association « Sauvegarde du patrimoine de Tamentit ». Le jeune homme, incrédule, estime que Tamentit doit être préservée et classée par l'Unesco. Cette région, indique le président de l'association, a connu son apogée durant les XIIIe et XVe siècles. « Le commerce était tellement florissant que la région avait sa propre monnaie », souligne Moussaoui. Elle fut aussi un carrefour commercial et un relais pour le repos et le ravitaillement des caravanes, d'où la création de points de commerce pour le fer, les ustensiles, la mosaïque, l'argent et les manuscrits. Même les juifs y ont séjourné. « A l'époque, cette région était tolérante, accueillante et surtout ouverte sur les autres cultures », précise-t-il. Les ksour à l'architecte arabo-saharienne, de couleur rouge brique contrastant avec le vert des palmiers et le sable doré, sont à couper le souffle. Ces ksour ont été réalisés à base de matériaux locaux dénommés « aghraf » constitué d'argile, de sable et de sel imperméable à la pluie, à la chaleur et au froid. Tamentit se distingue aussi par ses bibliothèques qui renferment des manuscrits d'une valeur inestimable. D'ailleurs, selon le président de cette association, le célèbre voyageur Ibn Batouta y a séjourné. Qui dit manuscrits, dit zaouïas. Celle de la confrérie El Bikria érigé au XVIIe siècle fait aujourd'hui office d'école coranique. Selon Moussaoui, un saint Coran datant du XIVe siècle y est préservé. Pour protéger cette richesse, classer et inventorier tous les manuscrits de la région du Touat, Gourara et Tidikelt, un centre régional a été créé à Adrar. Timimoun à la recherche d'un tourisme durable A environ 200 km plus au nord, une autre ville beaucoup plus connue que sa voisine du sud : Timimoun. La réputation de l'oasis rouge est toujours intacte. Son hospitalité aussi. De par son charme et ses potentialités agricoles, touristiques et commerciales, elle s'est imposée pour devenir wilaya déléguée. Mais les Timimounis veulent plus. Ils espèrent voir cette circonscription promue wilaya. En attendant, les projets foisonnent, du moins théoriquement, à Timimoun. Les investisseurs sont encouragés à réaliser des projets dans n'importe quel domaine. Mais il y a d'abord fort à faire. La wali délégué, Mabrouk Aoun, qui a la charge de quatre daïras et de dix communes à des soucis : l'alimentation en eau potable, l'assainissement, l'aménagement urbain, le désenclavement, l'éclairage, le ramassage des ordures et le transport urbain. « Tout cela demande du temps et de la patience », dit-il. Mais les Timimounis sont impatients de voir leur quotidien enfin changé. Ville touristique par excellence, ce ne sont pas les projets qui manquent. Plusieurs dossiers sont déposés pour être étudiés. Parcs de loisirs, campings, hôtels sont attente d'agrément pour être lancés. Timimoun mérite son statut de ville touristique. L'Oasis rouge est sortie de l'anonymat mais beaucoup reste à faire pour drainer un tourisme de masse. Lors de sa dernière visite dans la région, le ministre du Tourisme a insisté sur la continuité de la saison touristique qui ne doit pas se limiter, selon lui, aux fêtes religieuses et de fin d'année. Car Timimoun et sa région recèlent d'autres potentialités. Zone des déserts du monde, un haut lieu de l'histoire A 70 km de l'Oasis rouge, sur un monticule rocheux haut de 397 m, se dresse majestueusement le caravansérail des peuples du désert. Les lieux étaient une ancienne caserne de l'armée française qui servaient à la surveillance sur un rayon de 50 km, que commandait le tristement célèbre tortionnaire Marcel Bigeard. Ce dernier, raconte Abdeslam Kadaoui, responsable des lieux, avait perdu la bataille du grand erg occidental avec les moudjahidine qui ont éliminé 112 soldats français. Restaurée en 2003, cette caserne est devenue un centre de développement et de recherche en biodiversité liée au milieu saharien avec pour but de valoriser l'histoire de la région d'autant qu'un crâne datant de 7.000 ans a été retrouvé. Cette station inaugurée en 2003 par Chérif Rahmani, alors ministre de l'Environnement, se veut également une halte pour montrer l'intelligence de l'homme ancien en matière de construction. C'est l'argile, un matériau local, qui est privilégiée. La station a également abrité des congrès internationaux pour étudier les peuples minoritaires, les aires protégées pour préserver l'écologie, la biologie et la sociologie des habitants. Pour attirer les touristes, un vaste programme de reboisement a été entrepris ainsi que la réhabilitation des ksour. « Il faut étudier toutes les insuffisances pour donner sa véritable place au tourisme », estime Kadaoui. « Nous voulions dans un premier temps encourager les visiteurs algériens mais les billets d'avion sont très chers », regrette-t-il. Un autre problème surgit. C'est celui du tourisme saisonnier. « Certaines infrastructures travaillent 15 jours par an et cela n'est pas rentable », rappelle-t-il. Plus loin, c'est Ksar El-Mandjour qui se dresse tel un menhir. Selon un guide rencontré sur les lieux, c'est là où a été bâtie il y a sept siècles l'ancienne ville de Timimoun. Bien que non classée au patrimoine nationale, l'Oasis rouge a attiré toutes les célébrités nationales pour son s'boue. Certains touristes étrangers, habitués des lieux, n'ont jamais manqué cet évènement. La grotte d'Ighzer, un lieu magique Dans la commune d'Ouled Saïd et plus exactement dans le village de Badriane, se trouve la grotte d'Ighzer. De loin, elle attire de par sa forme et son énorme entrée. Creusée au pied de la colline occupée par un ksar, la grotte s'enfonce de 80 m environ dans le gré tendre appelé tafza. D'une largeur de 8 m et haute de 7 m, elle se rétrécit au fur et à mesure qu'on pénètre à l'intérieur. Fraîche en été et douce en hiver, c'est un abri contre la rudesse du climat du Sud. Les habitants des alentours y viennent faire la sieste mais aussi admirer les poissons et autres animaux fossilisés, vieux de plusieurs millions d'années. Certains visiteurs ont l'indélicatesse de se servir des coquillages et autres fossiles pour les vendre. Les amoureux qui sont passés par là ont laissé des graffitis pour marquer leur idylle à jamais. Le lieu appelle à la méditation. C'est une véritable communion qui s'installe dès qu'on s'enfonce un plus dans le boyau de la caverne. Que ce soit pour les touristes locaux ou étrangers, la fascination devant le coucher du soleil du Gourara est la même. C'est une autre dimension du temps et de l'espace. C'est un rêve éveillé. C'est un voyage mystique qui vous entraîne. Le soleil devient rougeâtre pour plonger et vous enivre l'esprit. Beaucoup sont restés stupéfaits devant tant de couleurs qu'offre le coucher du soleil. Tout le monde s'accorde à dire qu'il est le plus beau et le plus magique. Plus loin, les dunes de sable n'ont rien à envier aux montagnes enneigées. Tous ont surfé sur le sable, joyeux comme des petits enfants ayant découvert pour la première fois le ski sur sable. Mais le revers de la médaille est là pour nous dire que tout n'est pas blanc. Rencontré sur les dunes, Rachid Ould Nassir, responsable de l'agence « Mer de sable », parle avec amertume des remontées des eaux usées. « C'est le coup de grâce pour le tourisme », dira-t-il. Il enchaînera pour indiquer que le billet d'avion n'est pas à la portée de tous et le voyage par route est éreintant. « Cela pénalise notre activité », souligne-t-il. « Nous exhortons les pouvoirs publics à affréter des avions spéciaux pour le Sud pour attirer un flux important de touristes locaux », a-t-il suggéré. Cette mission vers Adrar et ses environs a été encadrée par des professionnels, généreux, expérimentés et surtout attentifs aux doléances des autres sans oublier les chauffeurs de bus. Ces derniers ont été honorés plusieurs fois pour leur sagesse, leur moralité et leur conduite au volant, leur capacité d'endurance et surtout leur degré de conscience professionnel. Un voyage à refaire avec plaisir.