Maintenant que les détails de l'emprunt obligataire national sont connus de tous, les opérateurs économiques misent sur la réussite de cette opération qui interpelle le patriotisme et le nationalisme des Algériens en ces temps de crise. « C'est une première en Algérie. Il s'agit d'un appel aux Algériens pour venir en aide au pays. Une initiative heureuse qui va permettre de s'inscrire dans une démarche nationale », a estimé Boualem M'rakèche, président de la Confédération algérienne du patronat (CAP). Sans vouloir mettre en doute la viabilité de l'opération, notre interlocuteur estime qu'il est temps pour « le système bancaire et financier d'évoluer et de s'inscrire dans l'universalité ». « En ces temps de logique de bancarisation, nos banques et structures financières doivent faire un effort et progresser en donnant au client, quelle que ce soit sa contribution, la valeur réelle et la considération qu'il mérite pour sa contribution à l'épargne nationale », a-t-il estimé. Pas de doute exprimé sur le sens de la solidarité et du patriotisme des Algériens. « C'est un devoir national. L'Algérien est connu pour son adhésion à ce genre d'initiatives à laquelle il répond sans problème. » Mais la réussite de cette opération nécessite, selon M'rakèche, une « campagne médiatique de longue durée pour informer et sensibiliser les citoyens sur l'importance de ce projet ». Un travail doit également être fait sur « le rétablissement de la confiance » entre les Algériens et les institutions bancaires. « Il faut s'interroger sur les raisons qui poussent les gens à garder l'argent chez eux plutôt que de le mettre dans les banques. Pour les citoyens, de l'argent dans les banques, c'est de l'argent perdu et volé. C'est une image qu'il faut changer à travers l'amélioration du fonctionnement des banques et la confiance des clients. » Le prix des titres et le taux d'intérêt proposé « sont attractifs ». « La banque offre un taux d'intérêt variant entre 1,5 et 2%. Un taux de 5 à 5,75% qui s'ajoute au partage des dividendes est intéressant », a-t-il indiqué. En faisant part de sa contribution à ce projet qui « a mis du temps » pour se concrétiser, le président de la Confédération des industriels et producteurs algériens (Cipa) a salué l'initiative. « Le pays fait appel à ses enfants pour contribuer à l'édification du pays. C'est un geste patriotique et nous n'avons aucun doute sur le sens du sacrifice de la population », a indiqué Abdelaziz Mehenni, président de la CIPA. Cet emprunt national est la solution préconisée par l'organisation patronale. « Nous sommes contre l'endettement extérieur. S'il y a un problème, nous le réglerons ici et entre nous car nous sommes capables de relever les défis », dira-t-il. Evoquant le taux d'intérêt et la polémique qu'il suscitée, le président de la CIPA appelle les citoyens à la raison. « Nous sommes musulmans. Nul n'a le droit de nous donner des leçons en interprétant le Coran selon ses convenances », a-t-il rappelé. Selon lui, l'Algérie traverse une période cruciale et a besoin de l'épargne de ses enfants. « Le Coran parle d'entraide et de solidarité. Les temps ont changé, la vie moderne a ses règles de fonctionnement. Au XXIe siècle, on ne peut plus se permettre de s'interroger sur le fonctionnement des banques », a-t-il indiqué. Cet emprunt est, selon Mehenni, une occasion en or pour « blanchir son argent ». Cette occasion peut être « saisie par les entreprises étrangères qui ne peuvent pas transférer leurs dividendes » en s'acquittant des obligations. L'emprunt national est une « excellente opportunité » pour les entreprises publiques et privées et les caisses de Sécurité sociale qui ont des problèmes de trésorerie. « Elles peuvent utiliser leur argent en achetant des obligations pour avoir des ressources financières permettant de combler d'éventuels déficits », a souligné Mohamed Hamidouche, expert en économie. En rappelant le « succès » de toutes les opérations d'emprunt obligataire institutionnel lancées par le passé, l'expert estime que les « conditions sont favorables » à la réussite de cet emprunt obligataire. « Il y a beaucoup de facilités dont la liberté de s'acquitter d'une obligation nominative ou à travers un porteur, le grand réseau de vente et enfin le taux d'intérêt proposé et qui est vraiment concurrentiel sur le marché monétaire ». Il prévoit « le relèvement de l'argent demandé » dans le délai de six mois proposé par le gouvernement. Pour lui, l'idéal aurait été de lancer cet emprunt « au niveau de la bourse à condition qu'elle soit connectée avec le marché mondial ». Il estime aussi qu'un grand travail de communication doit être mené pour expliquer aux institutions et au grand public « l'intérêt de chacune des options financières proposées ».