L'homme naît pour mourir mais sa légende est éternelle. Une légende qui se peaufine au fil du temps tant elle se transmet de génération en génération, pour devenir immortelle. Parmi toutes les légendes qui ont marqué la musique algérienne en général et kabyle en particulier, il y a celle de Slimane Azem dont le verbe est «siroté» à longueur du temps, qu'on l'écoute ou qu'on le fredonne. Quoi de plus noble que de lui rendre un hommage. C'est ce à quoi s'attellera aujourd'hui dimanche et demain lundi, la Direction de la culture de Tizi-Ouzou au niveau de la maison de la culture Mouloud-Mammeri. L'œuvre et la vie, de celui qui a permis à des générations entières de supporter l'exil et le mal du pays, seront revisitées au cours de cette rencontre hommage. Et ce, par l'évocation de l'immortel Slimane Azem avec des membres de sa famille, ses amis, ses compagnons et des chercheurs spécialistes de l'œuvre artistique de celui qui a bercé des générations par ses chansons où la trame reste l'exil, lui qui disait «On peut retirer ses terres à un homme, mais on ne peut retirer la terre du cœur d'un homme !» Lui qui est resté très proche des siens dans l'exil en évoquant leur malheur, leur joie et leur attachement au pays. Des propos dans lesquels nombreux sont ceux qui se retrouvaient loin de chez eux dans une nouvelle culture qui leur est imposée et qui a œuvré pour les déraciner. Mais Slimane Azem ne cessera de le leur rappeler pour ne pas oublier l'Algérie, leur beau pays «L'Algérie,mon beau pays. Je t'aimerai jusqu'à la mort. Loin de toi, moi je vieillis. Rien n'empêche que je t'adore. Avec tes sites ensoleillés. Tes montagnes et tes décors. Jamais je ne t'oublierai. Quelque soit mon triste sort». Ces deux journées d'évocation de ce maître de la chanson de l'exil se veulent aussi, comme il l'avait toujours désiré, un serment pour perpétuer son message d'insoumission, de rébellion contre l'ordre établi mais aussi de l'amour des proches et de la mère patrie «A vous les jeunes, donnez-moi votre parole d'honneur de poursuivre ce que je vous ai laissé pour continuer comme si j'existais éternellement». Ces journées sont organisées sous le haut patronage de la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, et sous l'égide du wali de Tizi Ouzou, Abdelkader Bouazghi. Au programme de ces deux journées hommage pour celui «qui n'a jamais été trahi par son chien son compagnon fidèle», des témoignages de membres de sa famille, ses amis et ses compagnons, évoqueront son riche parcours mais aussi le mal de l'exil qui le rongeait inexorablement. Trois conférences-débats seront animées par Abdenour Abdeslam : «Message moderne dans la chanson de Slimane Azem» : Rachid Mokhtari : «Lghorba (exil), espace de la satire, de l'ironie et de la contrariété», et Abdelkader Bendaâmèche : «Slimane Azem vu par Abdelkader Bendaâmèche». Enfin, la projection de films documentaires sur cette légende «Slimane Azem» de Noureddine Chenoud et "Slimane Azem, une légende de l'exil», réalisé Rachid Merabet. Le tout ponctué par un gala artistique lundi dans l'après-midi. Pour rappel, Slimane Azem est né le 19 septembre 1918 à Agouni Gueghrane au pied du Djurdjura dans la daïra de Ouadhias. Il quitta son village très jeune, à l'âge de 11 ans pour travailler chez un colon à Zéralda. C'est en 1937, qu'il arrive en France. Il travaillera d'abord comme aide électricien à la RATP, avant de prendre en gérance un café à Paris, juste après quelques années de travail obligatoire imposé par l'Allemagne d'Hitler. C'est là qu'il a entamé son immersion précoce dans les tourments de l'exil. Comme en témoigne sa première chanson, «Amuh amuh» consacrée à l'émigration, chantée aux débuts des années 40. Comme il chantera également contre l'occupation française dans Effeday ajraḍ tamurt-iw (Ô [nuée de] sauterelles, sors de mon pays). Mais ses chansons traitent aussi des problèmes de ses compatriotes. Il décédera le 28 janvier 1983 en France à Moissac dans le Tarn-et- Garonne. Une commune dont les élus ont baptisé une place au nom de Slimane Azem qui compte plus de 100 chansons dans son répertoire.