Le Parlement français doit se prononcer, mardi, sur la poursuite de la participation de la France à l'opération militaire de l'Otan en Libye. Ce débat est rendu obligatoire par la réforme constitutionnelle de 2008, stipulant que toute opération militaire engagée par l'exécutif doit faire l'objet d'un débat assorti d'un vote si elle n'est pas terminée au bout de quatre mois. Certes des voix se font entendre pour signifier leur refus de la poursuite des opérations. Le général Vincent Desportes, ex-directeur de l'Ecole de Guerre, est de ceux là. L'opposant notoire à la guerre en Afghanistan, estime, dans un entretien diffusé par le Journal du dimanche (JDD), qu'il est « temps de trouver un compromis avec les autorités libyennes ». Il considère que « nous ne pouvons plus attendre indéfiniment que le régime de Kadhafi tombe ». De son côté, l'ancien Premier ministre Dominique de Villepin, a dénoncé le risque d'enlisement si l'objectif devient « le renversement du régime Kadhafi » et demandé la fixation d' « un calendrier » de retrait. Toutefois, la messe est dite. Dans le camp de la majorité et de l'opposition socialiste, le choix belliciste se légitime par le respect de la résolution onusienne 1973. Les députés socialistes soutiennent la poursuite des opérations. « Aujourd'hui, ne pas poursuivre cette opération serait permettre à Kadhafi de regagner le terrain perdu », souligne Bernard Cazeneuve de la Commission de la Défense. Il appartient de fait au Ministre des affaires étrangères de proclamer solennellement la transgression de la 1973 en faisant de la chute de Kadhafi l'objectif central. « La question n'est pas de savoir s'il doit quitter le pouvoir, mais comment et quand», a-t-il soutenu. Des armes françaises larguées aux insurgés aux « bavures » à répétition de l'Otan, l'option militaire, longue de 4 mois de frappes aériennes, n'ont pas eu raison de la résistance de Kadhafi qui menace de porter la guerre au cœur de l'Europe. L'impasse est réelle pour la coalition qui a volé en éclat. Fragilisée par le niet du congrès américain et les réticences des alliés italien et britannique, elle se réduit comme une peau de chagrin pour épouser les formes de l'irrédentisme français. L'issue de la campagne militaire, compromise par l'absence d'un engagement au sol des troupes occidentales, se résume en fait à une hypothétique avancée des insurgés et le pathétique espoir que «cette affaire se termine pendant l'été », formulé par Axel Poniatowski, président UMP de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale. Le piége libyen menace de se fermer durablement sur la France sarkozienne en butte aux affres de l'enlisement redouté et à un effort de guerre évalué à 160 millions de dollars qui va s'alourdir. La campagne libyenne coûte chaque jour à la France environ « un million d'euros », a précisé le ministre de la Défense, Gérard Longuet. In fine, de la France d'alors qui a su éviter le syndrome irakien au bourbier libyen aux portes de l'Europe, le choix des extrêmes de l'Elysée est l'expression d'une crise de valeurs et de la bataille de leadership irrémédiablement perdue.