Résumé de la 119e partie n Tommy, ligoté et bâillonné, incapable de bouger et d'émettre un son, reconnaît Albert et veut attirer son attention… La situation générale lui semblait pourrie. Primo et d'une, il y avait cette pourriture de guerre. «Ces foutus Boches !» remâchait Albert, très sombre, mais presque sans rancune. Leurs «Heu Hitler !», leur pas de l'oie, leur volonté de dominer le monde, leurs bombardements, leurs mitraillages - et, plus généralement, leur propension à se rendre insupportables à l'univers tout entier... Il fallait les arrêter coûte que coûte, il n'y avait pas à tortiller. Mais, jusqu'à présent, personne, à ce qu'il semblait, n'en avait été capable. Secundo, voilà-t-il pas Mrs Beresford - personne bien sous tous rapports s'il en fut jamais - fourrée jusqu'au cou dans les pires ennuis et qui ne trouvait rien de mieux que d'essayer de s'y fourrer plus profondément encore. Comment c'est-il qu'il allait bien pouvoir s'y prendre pour la freiner des quatre fers ? Pas moyen, apparemment... Dressée contre la Cinquième Colonne, qu'elle était, la patronne - des salopards de première, entre parenthèses, cette racaille-là. Et dire qu'il y avait des Anglais bon teint dans le lot ! A vomir, que c'était…! Et puis le patron... Lui qui savait si bien empêcher la patronne de foncer bille en tête dans le brouillard... Bref, le patron qui était porté manquant... II n'aimait pas ça du tout, Albert. Et il reniflait que «ces foutus Boches», ils étaient derrière tout ça. Ouais... Ça sentait le pourri, cette affaire. Il ne devait rien y avoir là, comme qui dirait, que des mauvais coups à prendre... En réalité, Albert avait peu de dons pour le raisonnement structuré. Comme la majorité des Anglais confrontés à un problème, il tournait autour du pot jusqu'à ce que - par miracle ? - les choses s'éclaircissent. Ayant décidé qu'il fallait retrouver le patron, Albert, en bon chien fidèle, s'était mis en chasse. Il ne s'était pas lancé à sa recherche selon un plan préétabli, mais avait procédé comme s'il se fût agi de retrouver le sac à main de Mrs Albert ou de remettre la main sur ses lunettes lorsque la famille avait égaré l'un de ces deux objets essentiels. Dans de pareils cas, il partait de l'endroit où l'article manquant avait été vu pour la dernière fois et, de là, tirait son fil d'Ariane. En l'occurrence, on savait que Tommy avait dîné avec le capitaine Haydock, au Repos du contrebandier, puisqu'il était revenu à Sans Souci et que, la dernière fois qu'on l'avait vu, il en franchissait la grille. Par conséquent, Albert avait grimpé la colline jusqu'à Sans Souci et, plein d'espoir, passé cinq bonnes minutes à en contempler l'entrée. Mais rien de notable ne s'étant présenté à ses yeux, il avait, après un soupir, pris à petits pas le chemin du Repos du contrebandier. Comme le major Bletchley, Albert s'était, lui aussi, rendu au cinéma de Leahampton, et il en était sorti vive-ment impressionné par le thème du Troubadour vagabond. (à suivre...)