Dans une conjoncture marquée par le retour du débat sur la question de l'amnistie générale, le président de la Commission consultative nationale de promotion et de protection des droits de l'homme, Farouk Kesentini, a surpris plus d'un en proposant que l'Etat demande pardon aux familles des disparus et institue une journée nationale du disparu. Une suggestion qui ne manquera pas de marquer la rentrée politique et de susciter bien des remous… Inattendue, car la suggestion n'émane pas d'une de ces organisations ou formations politiques qui font de la question leur cheval de bataille depuis 15 ans. C'est bien le président de la très officielle Commission consultative nationale de promotion et de protection des droits de l'homme (CCNPPDH) qui en est l'auteur. Farouk Kesentini avait adopté jusque-là une prudence presque maladive dans son traitement de la question, tentant, sans trop de succès, faut-il le dire, de ménager la chèvre et le chou. L'exercice était d'autant plus difficile que la question a fini par prendre des allures de dossier politico-médiatique qui déchaîne les passions des deux côtés de la Méditerranée. En proposant, hier, que l'Etat «s'excuse officiellement auprès des familles concernées ainsi que l'institution d'une journée du disparu», M. Kesentini aura pris de court plus d'un en ce sens que la suggestion tranche avec les positions pour le moins ambiguës de son organisation et constitue une sorte d'appel à l'Etat algérien, qui s'est dit officiellement «responsable, mais pas coupable», de traduire dans les faits cette «concession» faite dans la cadre de la politique de réconciliation. «Cela participe de la réhabilitation des disparus durant la tragédie nationale qui n'étaient pas impliqués dans les actes terroristes», nuance le président de la CCNPPDH. Ce qui n'enlève en rien à l'originalité de la proposition faite sur les ondes d'une radio publique (Radio Internationale) et reprise avec force détails par l'Agence officielle APS. C'est, à plus forte raison, ce traitement médiatique privilégié réservé à l'événement par les organes publics, d'habitude très frileux quand il s'agit d'évoquer la question, qui incite à l'interrogation. Les autorités sont-elles décidées à amorcer un nouveau virage dans leur position vis-à-vis du dossier et de la question de la réconciliation nationale en général ? L'hypothèse n'est pas à écarter dans cette conjoncture où l'on parle, avec de plus en plus d'insistance, de l'éventualité d'aller vers une amnistie générale soumise à l'approbation populaire. Une option que d'aucuns estiment susceptible de classer définitivement le dossier et de mettre fin au bras de fer qui met aux prises depuis plus d'une décennie l'Etat Algérien avec les organisations des 6 046 familles de disparus reconnus officiellement.