Habitude n Karim 42 ans, émigré en France, est père de trois garçons. Sa famille passe depuis le début du ramadan, ses soirées à la Madrague. C'est la première fois depuis 18 ans qu'il passe le ramadan parmi les siens à Aïn Bénian. Sa femme et ses enfants ne sont pas venus avec lui, puisqu'il ne peut, comme il l'avoue, leur assurer les frais du voyage. «Je ne peux pas venir en famille, les billets sont chers, nous ne pouvons pas nous permettre de venir tous ensemble», regrette-t-il. «La réduction des tarifs des billets annoncée par le département de Djamel Ould Abbas au profit des émigrés voulant se rendre au pays pendant ce mois sacré n'est que mensonge», nous dira notre interlocuteur. «Cela n'existe pas réellement, moi, personnellement, je me suis déplacé au consulat d'Algérie en France pour avoir de plus amples renseignements, et, à ma grande surprise, sur place, on m'a expliqué que cette formule n'existait pas de tout. Alors à quoi sert-il de faire des campagnes de propagande ?! qu'ils cessent de nous chanter des mensonges», affirme Karim. Cependant, «laissons tomber cela, car nous avons pris l'habitude de ces mensonges, cela n'affecte pas mon lien à mon pays d'origine et ma famille à Aïn Bénian qui, comme moi, préfère la plage de la madrague pour se défouler un peu après une journée de jeûne», dit-il, nostalgique. «Certes, en France, il y a tout, mais il nous manque ces qaâdate en famille. Menteur sera cet émigré attaché à sa culture et à sa religion, qui vous dira que c'est mieux de passer le ramadan en France», nous lance-t-il. Tout en répondant à nos questions, Karim sert du thé à des familles. «Vous voyez cette table n'est pas la mienne, elle appartient à mon cousin qui s'est installé ainsi, pour vendre du thé, du café et louer les parasols, je le remplace aujourd'hui. Cela me fait un grand plaisir de voir les familles qui circulent et qui s'installent sur la plage en toute sécurité et partagent, entre elles, des moments de plaisir et de détente, en ces soirées ramadanesques. Après la prière de tarawih, les familles viennent ici avec des chaises et des tables pour s'installer sur la plage et y rester jusqu'à 3 ou 4 heures du matin», renchérit-il. A quelques mètres de là, c'est la famille de Karim qui s'est installée. El-Hadj Amar est assis autour d'une table avec ses enfants et ses petits-enfants. Il est tout content de se retrouver entouré de sa famille. La joie est perceptible sur son visage. C'est une véritable ambiance familiale. Il est le seul homme, car toute la famille et composée essentiellement de femmes, mais aussi de jeunes filles. Tous sont venus de Aïn Bénian, c'est-à-dire d'à côté. Ami El-Hadj qui se dit ne pas être amateur de dominos et de jeux de cartes comme plusieurs de nos vieux, souligne que si les familles ont regagné aujourd'hui ces lieux, c'est surtout grâce à l'amélioration de la situation sécuritaire. «A l'époque, nous avions peur de venir ici. Nous ne venions jamais en famille. Si nous décidions de faire un saut à la plage, il fallait venir en groupe, la peur au ventre d'être agressés. Aujourd'hui, la plage a retrouvé son calme et sa tranquillité, el-hamdoulillah, Dieu merci», remarque Ami El-hadj en ajoutant que la situation s'est améliorée par rapport à l'année dernière. «Vous savez, ces qaâdate ramadanesques font partie des traditions familiales, et puisque cette année le ramadan coïncide avec la période des grandes chaleurs, nous préférons passer nos soirées sur la plage», estiment les autres membres de la famille.