Ammi M?hamed, 61 ans, adossé au mur crasseux d?un immeuble, discute tranquillement avec son compagnon Morseli. Un bonnet noir couvre une tête chauve, quelques mèches blanchâtres s?en échappent. Sur son visage froissé se dessine un sourire candide, lorsque la question sur les élections lui est posée. «Oui. J?irai voter, c?est un devoir. Je trancherai pour l?homme convenable, un véritable réformateur, qui sauvera l?Algérie. J?espère seulement que ces élections seront transparentes.» Morseli, 51 ans, un robuste homme, habillé modestement aussi, ne partage pas l?avis de son compère. «J?irai voter, pour pas laisser dire que ce peuple n?a aucune opinion, qu?il n?a rien à dire. Pourtant, j?irai le faire sans aucune conviction d?un éventuel changement ou d?une quelconque amélioration du cadre de vie. Depuis 1962 le peuple vote et rien n?a changé !». Notre interlocuteur s?emporte et hausse le ton subitement. «Les Tunisiens nous ont donné la raclée de notre vie et personne n?a osé rien dire. Nos politiques ne courent qu?après les postes.» Les deux retraités se mettent ensuite à évoquer longuement leurs tracas. L?absence de jardins publics où ils peuvent discuter tranquillement et oublier leurs souffrances. «Les cafés débordent de jeunes, nous ne pouvons y rester. Notre journée se dissipe ainsi, sous ces murs», s?indigne Ammi M?hamed. Ils parlent notamment de l?absence d?infrastructures rudimentaires, deprojets sociaux, d?activité pour les jeunes.