Emplettes n Les femmes choisissent le shopping nocturne, avec une nette préférence pour les magasins de prêt-à-porter et les parfumeries. Ne voulant pas être prises de court à la veille de l'Aïd-El-Fitr, certaines mères de famille ont décidé d'habiller maintenant leurs enfants. «Nous avons l'intention de devancer la flambée habituelle des prix et, pourquoi pas aussi, ‘'chiper'' les plus beaux habits pour nos enfants avant la grande ruée, nous disent plusieurs dames accostées au niveau des rues Larbi-Ben M'hidi et Didouche-Mourad. Une remarque de taille : les chalands privilégient les chaînes européennes, qui ont ouvert une vingtaine de boutiques à Alger. De Réghaïa à Aïn Benian, en passant par Sidi M'hamed, le boulevard colonel Amirouche et Kouba, ces magasins affichent en majorité un écriteau signalant qu'ils restent ouverts au-delà de minuit. Les prix qui y sont pratiqués ? Pour certains, ils sont «abordables», pour d'autres, «chers !». Une technique utilisée par les gestionnaires de ces magasins semble infaillible : un vêtement exposé pour l'Aïd dans des rayons ornés du croissant et de pancartes où on peut lire «Saha Ramdankoum» et pourvu d'une double étiquette, l'une affichant le prix en euros et l'autre en dinars. «Pas question que la transaction se fasse en devises, l'information est donnée à titre indicatif», nous dit une vendeuse qui a usé de «toute une gymnastique» pour démontrer à une cliente que «la conversion en monnaie locale du prix en euros du produit qu'elle a en main est très avantageuse». La cliente est vite convaincue par la vendeuse qu'elle fera une bonne affaire. «Acheter un blouson pour enfant à 1 500 dinars, alors qu'il est proposé en France à 18 euros, c'est une affaire», nous dit une dame, victime de l'arnaque. Cela dit, «rien n'indique que le prix affiché en euros est conforme à celui du même produit en Europe», lui rétorque son mari, convaincu qu'il s'agit d'un attrape-nigaud. Les moins nantis évitent ces boutiques et leurs produits labellisés. Pour vêtir leurs enfants, ils préfèrent se rendre au D15, un marché à ciel ouvert situé à El-Harrach. On s'interroge sur l'appellation «D15» ? Ce numéro de code est celui d'un document de la douane censé accompagner les containers en simple transit, donc des marchandises non destinées au marché local. Mais des trabendistes parviennent à détourner ces containers et écoulent les produits, le plus souvent venus de Chine, à des prix défiant toute concurrence. Ils sont des dizaines de chefs de famille accompagnés d'une ribambelle d'enfants à déambuler dans ce marché. «Aujourd'hui, le collégien et le dealer s'habillent de manière presque identique», raconte un vendeur. «Le premier porte des Nike contrefaits achetés à 1 000 dinars chez nous et le second un jean 501 authentique payé à 7 000 dinars ailleurs». Prix et argent sont deux termes qui reviennent souvent dans les conversations en ces veillées ramadanesques.