Réalité - La violence sexuelle à l'égard des enfants demeure très mal maîtrisée en Algérie à cause de son aspect tabou, selon le Réseau Nada. Le problème de la violence et des droits de l'enfant en Algérie a été au cœur des débats qui ont réuni, jeudi dernier, des représentants de différents ministères, de l'Unicef, des services de la Sûreté et de la Gendarmerie nationales ainsi que des représentants de la société civile. L'initiative vient du Réseau Nada qui a souhaité à travers ce rendez-vous sensibiliser la société et les institutions publiques à prendre en charge, notamment, les enfants victimes de violence sexuelle. Une prise en charge qui devrait se traduire, selon cette association, par la prévention, la protection et la réhabilitation. Les dernières statistiques qui remontent à 2008 font état de 957 enfants victimes de violence sexuelle pour le seul premier trimestre de la même année. Le président du Réseau algérien pour la défense des droits de l'enfant (Nada), Abderrahmane Arrar, a indiqué dans ce cadre que son réseau avait reçu en l'espace d'une année et demie 13 000 plaintes pour violences faites aux enfants. Nada «a pris en charge 103 cas d'agression sexuelle», a fait savoir M. Arrar qui ajoutera par la même occasion que son réseau compte généraliser ses cellules d'écoute et d'orientation du numéro vert (30 33) pour atteindre l'ensemble du territoire national d'ici à 2015. Ce numéro a permis à cette ONG de déterminer les catégories les plus touchées par ce genre de violence. Il s'agit essentiellement des enfants de moins de cinq ans qui «constituent une source d'inquiétude pour les citoyens», affirme l'intervenant qui assure de la disponibilité de son association à travailler «avec des ONG étrangères pour développer son expérience en la matière». Dans cette perspective d'améliorer la prise en charge des victimes de cette forme de violence, un programme de formation est prévu dans le cadre d'un projet de coopération entre Nada et l'association Amane. Ce projet intègre dans son contenu l'organisation de formations au profit des spécialistes appartenant au Réseau sur la prévention de la violence sexuelle et la prise en charge des victimes. Il faut savoir que la formation chez la majorité des acteurs associatifs, professionnels et bénévoles, qui interviennent dans le cadre de la lutte contre ce phénomène, reste très relative, selon Nada. «Leur formation, qu'ils soient médecin, juriste, psychologue, etc. n'intègre pas les aspects de la lutte contre les violences et abus sexuels sur l'enfant», affirme l'ONG. Arrar a jugé nécessaire à cet effet l'élaboration d'une approche prospective pour que la violence ne soit pas «un mode de vie». Les résultats d'une étude sur les besoins de renforcer les capacités des acteurs de la protection de l'enfance en matière de lutte contre les violences sexuelles à l'encontre des enfants, réalisée dans quatre pays de la région de l'Afrique du Nord, fait ressortir un vide juridique flagrant pour ce qui est de l'Algérie. L'enquête a montré que les violences et abus sexuels à l'égard des enfants en Algérie sont définis de manière très vague dans le code pénal, notamment son article 336, qui qualifie le viol de crime mais n'apporte aucune précision quant aux typologies de violence et abus sexuel. Outre cette défaillance, on parle de l'absence totale de mécanismes de signalement de tout acte de violence commis à l'encontre de l'enfant.