Tension - Le Premier ministre kenyan Raila Odinga a prévenu hier qu'il ne laisserait pas s'installer une «guerre de religions» entre chrétiens et musulmans. Ainsi, et après deux jours d'émeutes déclenchées par le meurtre du prêcheur islamiste Aboud Rogo Mohammed dans la ville côtière de Mombasa, la situation ne semble pas, du moins pour l'heure, en phase de se calmer. Venu s'entretenir à Mombasa avec des leaders musulmans et chrétiens, M. Odinga a fustigé ceux qui tentent d' «amener un conflit entre chrétiens et musulmans». «Nous ne laisserons pas des forces extérieures inciter les Kenyans à une guerre de religions», a-t-il martelé devant la presse à l'issue de la rencontre, dénonçant une nouvelle fois le meurtre du prêcheur lundi. «Nous voulons voir une coexistence entre toutes les communautés vivant à Mombasa», a poursuivi le Premier ministre qui, jusque-là, ne s'était publiquement exprimé sur les violences que dans un communiqué. Alors que la police assurait que le calme était revenu hier dans la deuxième ville du Kenya, une attaque à la grenade contre un camion de police dans la soirée a fait un mort et quatre blessés, selon des responsables kenyans. Trois policiers avaient déjà été tués dans une attaque à la grenade contre leur véhicule par un groupe d'émeutiers, et un civil avait été retrouvé mort dès le premier jour des émeutes lundi. Les violences ont aussi fait une vingtaine de blessés, dont une douzaine de policiers, selon la Croix Rouge. Hier matin, 24 suspects ont été inculpés par un tribunal de Mombasa pour rassemblement illégal et participation aux émeutes. Selon le ministre de la Sécurité par intérim, Yusuf Hajji, 32 suspects ont au total été arrêtés. Le parquet kenyan a promis une enquête sur le meurtre, qui impliquerait l'inspection des polices et la commission nationale des droits de l'Homme. Alors que plusieurs organisations musulmanes voient dans cet assassinat une nouvelle exécution extrajudiciaire d'un responsable musulman à Mombasa, l'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a réclamé une enquête réellement indépendante. Les émeutes, au cours desquelles des églises ont été pillées ou brûlées, ont éclaté immédiatement après le meurtre de Aboud Rogo Mohammed, abattu alors qu'il se trouvait à bord de son véhicule avec sa famille. Prêcheur controversé, il était soupçonné de liens avec les islamistes somaliens shebab. Rogo était notamment sous le coup de sanctions de l'ONU et des Etats-Unis qui l'accusaient d'avoir recruté des combattants et levé des fonds pour le mouvement somalien, rallié à Al-Qaîda. Début 2012, Il avait été arrêté dans une descente de police chez lui. La police avait affirmé avoir trouvé armes, munitions et détonateurs. Le prêcheur était depuis en liberté sous caution. Le Kenya est majoritairement chrétien, mais une importante communauté musulmane vit le long de sa côte.