Avis - Depuis quelques années, les professionnels de l'art des planches se posent la question de savoir où en est l'écriture dramaturgique. Pour eux, l'adaptation et la traduction peuvent-elles être considérées comme telle ? Autrement dit, adapter un texte théâtral serait-il en soi une écriture théâtrale ? De l'avis de certains spécialistes, l'adaptation ou même la traduction s'avèrent effectivement une écriture dramaturgique. Si certains, à savoir les puristes, pensent que l'adaptation n'est autre qu'une reprise d'un texte déjà écrit, à la limite d'une reproduction, voire d'un pastiche, d'autres, à savoir les novateurs, ces promoteurs d'une vision de travail neuve, croient fermement que l'adaptation est en soi un acte de création. Cela dit, il s'agit bel et bien d'une écriture théâtrale. Driss Guergoua, chercheur algérien, estime que «l'adaptation se révèle un effort de création, une recherche d'une poétique nouvelle. Elle se révèle aussi une ouverture sur l'autre, et l'inscription dans l'universalité. C'est s'imprégner de nouvelles expériences théâtrales et se nourrir de nouveaux supports artistiques et littéraires.» Driss Guergoua, pour qui l'écriture théâtrale est profondément, voire intimement liée à l'environnement extérieur dans lequel évolue l'auteur, des facteurs qui aident ce dernier à écrire et le soutiennent dans son travail de création, explique : «Grâce à l'adaptation, la pratique théâtrale en Algérie a connu, dans les années 2000 et cela continue même aujourd'hui, une effervescence sans précédent. Les raisons de cette évolution reviennent au fait qu'il existe plusieurs festivals, des espaces favorables à l'émergence et à la promotion de l'art des planches.» C'est ainsi que des estimations formulées par ce dernier démontrent du constat optimiste quant au développement de la pratique théâtrale en Algérie. «Plus de 1 300 textes théâtraux – entre écriture et réécriture, donc adaptation – ont été écrits entre 2000 et 2012, contrairement aux années 1990 où le nombre ne dépassait pas les 100», observe-t-il. Il va encore plus loin dans sa comparaison, en soulignant que même dans les années 1980, la production de textes n'excédait pas les 150. C'est dire que la pratique théâtrale en Algérie a connu un essor estimable, transcendant ainsi les obstacles de tous genres, allant de plus en plus vers un avenir prometteur. Par ailleurs, le chercheur explique que la scène théâtrale algérienne est marquée par une nouvelle génération d'auteurs. Il explique aussi que l'apparition d'un nouveau genre théâtral auquel de plus en plus d'auteurs s'adonnent, qu'est le monodrame ou le monologue, a largement contribué à l'augmentation de la production de textes théâtraux. Cela dit, cette estimation heureuse, augurant de belles années pour le théâtre algérien, vient réfuter l'idée qui dit que le théâtre algérien connaît une crise de texte. En d'autres termes, l'adaptation, qui est donc une forme d'écriture dramaturgique, renouvelle l'écriture, redonne à la création théâtrale une dynamique nouvelle et même constructive. L'on peut d'emblée constater qu'il ne faut pas minimiser, stigmatiser l'adaptation, voire la «réécriture» du texte théâtral. Bien au contraire, il faut la considérer comme un acte de création, partie intégrante de la pratique théâtrale.