Fatalité Après avoir perdu leurs logements, car il est manifestement impossible de les réhabiliter, selon les agents du CTC, les sinistrés du domaine Lounger et Si Boualem El-Aloui n?en continuent pas moins de manger leur pain noir. Cette fois, c?est pour une histoire de relogement qu?ils bataillent. Tout a commencé lorsque promesse leur a été faite par le P/APC de Aïn Taya d?un relogement dans des chalets. Dans la chaleur des tentes sous lesquelles ils sont entassés depuis plus d?une année, ils appréhendent la fatalité de l?oubli. Ainsi, la patience s'amenuise et les nerfs lâchent au bout de 14 mois passés sous la pluie et le froid et maintenant la canicule. Les torrents de reproches et de colère se déversent. Aucun responsable n?est épargné : élus locaux, wali et comités de cité? Les mêmes paroles amères sont ruminées par chacun de ces sinistrés. «Aucun responsable ne nous rend visite», lance, déçu, un citoyen. «Même le P/APC ne nous reçoit pas», affirme un autre. Les enfants errent toute la journée. «La scolarité de mes enfants s?en est ressentie, notamment ceux qui sont en classe d?examen», déplore une mère de famille. En effet, ces derniers n?ont que deux choix : réviser dans des conditions déplorables ou abandonner complètement les études. Mohamed marche, hagard, au milieu de ces immenses terrains. Les murs visiblement fissurés dominent le hall d'entrée de sa maison. «Une vraie guillotine», souffle un vieil homme. Aïssa, un sexagénaire, nous invite à visiter son ancienne demeure. «C'étaient pourtant des constructions coloniales très solides, regardez ce qu'il en reste !» Quelques meubles sont toujours là comme pour témoigner de l?attachement de ces paysans à leurs modestes maisons, mais les lieux sont vides. A l?intérieur des tentes, les familles ont posé de maigres effets, vu l?exiguïté des lieux. C?est dans ce minuscule espace que Mohamed abrite sa famille. 14 personnes entassées sous la tente ouverte aux ordures et aux eaux usées qui encombrent les terrains vagues tout près. Plus loin, un père de famille raconte qu?il habite dans cet endroit depuis plus de 50 ans et s?interroge : «Comment peut-on nous réclamer des papiers ?» «Notre surprise fut grande lorsque nos voisins (12 familles) ont été relogés. Pourtant, ils ne possèdent aucun document certifiant qu?il s?agit bien de leurs biens», conteste notre interlocuteur qui ajoute : «Nous nous connaissons tous ici, nous n?avons jamais eu besoin de papiers et les autorités connaissent, parfaitement, notre situation.» Sans avoir l?intention de nuire aux autres sinistrés, nos interlocuteurs souhaitent seulement que leur prise en charge se fasse au même titre que leurs voisins. De son côté, le P/APC de Aïn Taya explique cette situation par le fait que «ces sinistrés sont des occupants sans titre, ce qui pose un réel problème pour leur relogement, d?autant que le CTC évalue uniquement les dommages et constructions normatives». Avec la réhabilitation des constructions endommagées, ces sinistrés seront, selon le P/APC, relogés dans des chalets évacués. Cependant, nombreux sont les citoyens qui nous ont confirmé l?existence de chalets inoccupés. En attendant que les autorités locales, voire de wilaya se penchent sérieusement sur le problème de ces familles, les conditions de vie et de santé de ces populations ne cessent de se dégrader.