Spectacle Le jeu chorégraphique était recherché, relevant d?une esthétique privilégiant la magie du mouvement et cultivant le culte du beau. Le tango, une musique typiquement argentine, née il y a plus d?un siècle dans les faubourgs de Buenos Aires, était, mercredi, à l?honneur à la salle Ibn-Khaldoun, lors d?un spectacle de musique et de danse présenté par la Compania argentina. Ce ballet a interprété les meilleurs moments du tango, emportant le public avec lui à travers une musique translucide et un jeu chorégraphique présenté dans une mise en scène contemporaine. Le spectacle était divisé en deux tableaux, le premier retraçant la naissance du tango, ses débuts dans les rues, puis dans des lieux tels que les bistrots perdus des quartiers populaires : le monde marginal de Buenos Aires au début du siècle dernier (XXe). Les danseurs se meuvent et évoluent dans un espace clos et clandestin. Toutefois, cet espace, qui apparaît balisé par des frontières sociales, s?avère aéré, ouvert, prenant des proportions plus grandes, plus larges à mesure que ceux qui l?animent vont d?un côté et de l?autre en toute liberté de mouvement, traversent l?espace, le parcourent en tous sens. Quatre couples dansent, suivant chacun une trajectoire différente selon une intuition intérieure et au rythme du tango qui ponctue leurs pas mesurés, alertes, allant, çà et là, sans s?enchevêtrer, se perdre dans les méandres de mouvements complexes et savamment étudiés. Tout est pensé, imaginé dans le moindre détail, donnant ainsi lieu à un jeu chorégraphique recherché, relevant d?une esthétique privilégiant la magie du mouvement et cultivant le culte du beau. Chacun des couples danse sur un ton spontané, nuancé ; chacun dévoile une sensualité jubilatoire. Le tango agit sur le pas et les mouvements, surgissant d?une profonde sensibilité, agit sur la scène qui, elle, agit sur le regard, le plonge dans une ambiance enthousiaste, chargée d?émotions euphoriques. Un enthousiasme manifeste. Plus tard, en seconde partie, le tango passe des faubourgs de Buenos Aires pour aller s?exhiber et se faire connaître dans les théâtres de bonne réputation et sur les scènes internationales. Le tango quitte les lieux clos et clandestins pour aller briller sous les feux des projecteurs. Il y triomphe, éblouissant ainsi le monde de ses pas, de sa musique, de son allure et de la féerie qu?engendre tout cela. Les danseurs apparaissent dans le deuxième tableau dans des compositions chorégraphiques nettes, assurées, mettant en valeur la précision du rythme redoublé des pas, traduisant à l?infini une poésie dans le mouvement corporel ; chaque gestuelle témoigne d?une recherche artistique toujours renouvelée.