Ambiance n 10h 17. Ce n?est pas une heure de pointe, mais l?autoroute est encombrée. Un enfer pour ceux qui sont forcés de faire l?aller-retour de samedi à jeudi. En évitant Chevalley où la trémie n?a rien réglé, on esquive les routes pour ne pas tomber dans des traquenards avec une succession de ronds-points, de stops et de bouchons. L?air est irrespirable. Le décor piteux. Des villas en construction sur une immense verdure. Ah le bon vieux temps quand Dely Ibrahim était un havre de paix avec les vaches dans les grands pâturages, les cross, les gens qui cultivaient les vignobles, les familles qui pique-niquaient les week-ends? Voilà le décor d?aujourd?hui : du béton, du béton? et mille boutiques de faïence au centre-ville où il faut entreprendre un travail de fourmi pour trouver une place pour stationner. On avait l?impression que les carcasses squelettiques de 4 à 5 étages avec des toits en tuile se disputaient une rude concurrence, à quelques encablures seulement des préfabriqués de Aïn Allah, l?emblématique cité des Danois. Une autre impression : celle qu?à Dely Ibrahim rien n?est fini. On construit au petit trot et on agresse la verdure d?une façon expéditive. Tout donne l?air d?être en devenir. Avec un roi indétrônable nommé béton. Les villas cossues remplacent les guinguettes. D?immenses maisons à l?architecture différente s?amoncellent à perte de vue. Beaucoup de tuiles et très peu de jardins et de verdure. Le tout à travers des rues et ruelles non goudronnées où se succèdent des villas aux murs épais et aux nombreux étages. Des maisons colorées accrochées aux falaises avec des ruelles asphaltées qui ne révèlent aux promeneurs aucun charme caché. Le centre-ville est ce qu?on appelle communément l?ancien village. Un village ? Plutôt un grand bazar où il faut beaucoup de souffle et de ténacité pour dénicher une bouteille d?eau minérale ou une place pour son auto. Le nouveau Dely Ibrahim grandit rapidement, à la vitesse de l?éclair. L?ancien village, avec ses rues en pente est un pluriel de magasins. Rien que des matériaux de construction : faïence, sanitaires, équipements de cuisines, serrureries, ferronneries, carrelage, céramique? sont exposés dans un décor chaotique. Camions et camionnettes se disputent quelques mètres de stationnement dans des parkings sauvages improvisés par des jeunes dés?uvrés, les seuls du tout Dely Ibrahim à s?en sortir à bon compte avec jusqu?à trois mille dinars de recettes par jour. Bien mieux qu?un salarié. Le 21 septembre 1832? l Le 21 septembre 1832, une ordonnance royale crée le premier village d'Algérie (sous administration française) dénommé Dely Ibrahim, près d'Alger. Ce premier village colonial sera peuplé par une cinquantaine de familles bavaroises. L?élevage des bovins et le vignoble seront leur deux principales activités.