Résumé de la 1re partie n Marie-Louise Joubert n'a trouvé qu'un travail de fille pauvre : serveuse dans un bouillon populaire, jusqu?au jour où elle fait la connaissance d?un riche Américain? Arnold Williams, qui est tombé follement amoureux de Marie-Louise, ne passe, en effet, que quatre mois de l'année à Paris. Le reste du temps, il est obligé d'aller à New York pour ses affaires. Il a donné à la jeune femme tout ce qu'elle voulait, tout ce qu'il y avait de plus beau, de plus cher. Il lui verse des mensualités princières, mais à une condition : il exige d'elle une fidélité absolue, sinon il lui coupera les vivres et il lui reprendra tout. Marie-Louise Joubert a accepté, bien entendu. Et depuis deux mois qu'Arnold est parti, elle tient parole. Elle paraît dans les lieux à la mode, mais seule. Elle repousse impitoyablement toutes les avances. Ce comportement renforce encore l?empressement autour d'elle. Les hommes font des folies pour vaincre sa résistance. Plusieurs ont même menacé de se suicider. Mais Marie-Louise Joubert demeure inflexible et son attitude hautaine lui a valu un surnom dont elle n'est d'ailleurs pas fâchée : Sa Majesté. Ce soir de février 1909, Sa Majesté dîne chez Maxim's en compagnie d'amis, rien que des couples mariés. Elle a pas mal bu. Elle se sent très gaie. Les violons la rendent rêveuse... Elle soupire devant sa flûte de champagne. Bien sûr, il serait trop stupide de perdre une fortune miraculeuse. Mais la raison, la volonté ne sont pas tout. Quand on a vingt ans, qu'on est belle et qu'on est follement désirée par les hommes les plus séduisants, il y a des sacrifices qui sont à la limite du supportable. Un claquement de talons fait sursauter Marie-Louise. Un homme d'une trentaine d'années, en tenue de grand officier du Tsar, s'incline galamment devant elle : «Mademoiselle, pourriez-vous m'accorder cette danse ?» Les violons ont entamé une valse tsigane. Marie-Louise se lève et tend son bras au bel officier. Il y a un murmure parmi les convives, Sa Majesté est descendue de son piédestal. C'est un événement mondain. Demain, dans le Tout-Paris, on ne parIera plus que du grand-duc Alexis, le vainqueur de cette citadelle imprenable. Marie-Louise se rassied, tout essoufflée. Un serveur s'approche d'elle : «Mademoiselle, on vous demande au téléphone...» Très intriguée par cet appel inattendu, Marie-Louise Joubert suit le garçon jusqu'à la cabine. Elle décroche le combiné : rien. Il n'y a personne au bout du fil... C'est alors qu'elle remarque que le serveur n'a pas bougé et qu'il la dévisage avec insistance. Elle s'apprête à le remettre à sa place. Celui-ci ne lui en laisse pas le temps : «J?ai choisi ce prétexte pour vous parler?» Marie-Louise l?interrompt, scandalisée : «Qu?est-ce que cela signifie ?» Mais le serveur continue comme s'il ne l'avait pas entendue : «Pour vous parler de la part de monsieur Williams...» Du coup, la jeune femme devient toute pâle. «Je suis désolé de vous l'apprendre, mademoiselle, mais je suis employé par monsieur Williams pour vous surveiller. Je dois lui adresser un rapport toutes les semaines. Et d'après ce que j?ai cru comprendre, il a des informateurs comme moi dans tous les endroits où vous êtes susceptible de vous rendre.» Marie-Louise sent la panique l'envahir. «Ecoutez... Ne lui dites rien. Je vous en serai reconnaissante?» Le garçon secoue la tête. «Non. Je vous remercie. Si je me taisais, il l'apprendrait par quelqu'un d'autre. Et je ne tiens pas à perdre la gratification qu'il me donne. Elle est... estimable.» Marie-Louise s?enfuit. (à suivre...)