Brigades n Fortes de plusieurs milliers d'hommes, essentiellement d'ex-rebelles, elles stationnent aux côtés des soldats russes aux check-points de Grozny et participent, avec eux, aux opérations contre la rébellion. Salman Khamyskhanov, enseignant à Grozny, n'ose plus dormir chez lui depuis qu'il a été arrêté, il y a un mois, par les milices de Ramzan Kadyrov, l'homme fort de Moscou en Tchétchénie, qui font régner la terreur dans la République rebelle. Il raconte comment, le 11 janvier, au petit matin, il a été pris à son domicile, avec son frère Salaoudine, par des hommes en armes, tous Tchétchènes, son T-shirt retourné sur la tête. Après une heure de route, il s'est retrouvé dans une cellule dans un lieu de détention inconnu. «Ils se sont mis à me frapper, à me demander si je connaissais des chefs rebelles et à m'accuser d'avoir appris à mon frère à poser des mines», explique l'enseignant de 28 ans. Il dément toute participation à la rébellion. Au deuxième jour de sa détention, il a été relâché, sans explication. Il est l'un des rares à oser accuser publiquement les «Kadyrovtsy» de son enlèvement et n'a pas hésité à interpeller Ramzan Kadyrov, Premier ministre par intérim, via la télévision locale, pour demander la libération de son frère. Ces milices avaient été conçues à l'origine comme la garde personnelle du père de Ramzan Kadyrov, Akhmad, à la tête du régime pro-russe de Grozny, avant son assassinat en mai 2004. Le président Vladimir Poutine vante leur «efficacité», tandis que la population et les ONG comme Human Rights Watch ou Memorial les accusent de faire régner la terreur et de pratiquer torture et exécutions sommaires. «Pour Moscou, il s'agit de neutraliser la population par la peur, avec ces milices locales qui connaissent bien mieux le terrain que les fédéraux», explique Chamil Tangiev, du bureau de Memorial à Grozny. L'ONG a recensé plus de 300 enlèvements en 2005. 127 victimes sont toujours portées disparues, 23 ont été retrouvées mortes et plus de 150 ont été libérées. Créées en 2000, les milices sont réparties aujourd'hui dans différentes structures implantées à travers toute la République, du centre antiterroriste au régiment pétrolier, officiellement en charge de la surveillance des gisements. Leur siège à Grozny, dans un bâtiment flambant neuf aux allures de petit château, est un lieu de détention illégale, accuse Chamil Tangiev.