Alors que toute l'Italie, peuple et dirigeants, fête ses héros de Berlin, l'autre Italie, celle du football, retient son souffle et tremble en attendant le verdict final pour ce qui est considéré comme étant le scandale du siècle. L'affaire du Totonero du début des années 1980 est du pipi de chat devant le réquisitoire accablant du procureur Stefano Palazzi dans le mégaprocès du Calcio lié au réseau «Lucky» Luciano Moggi. Cinq clubs, et pas des moindres, vingt-six personnes, toutes des personnalités influentes et acteurs du ballon rond ou des médias, sont éclaboussés dans cette affaire. Le quatrième titre Mondial acquis par la Squadra Azzura servira certainement d'airbag pour amortir le choc, mais il ne pourra empêcher la carrosserie du Calcio de prendre un sale coup. Des clubs, la Juventus, le Milan AC, la Fiorentina et la Lazio Rome risquent la rétrogradation dont les incidences sportives et surtout financières seront incommensurables. Les juges de ces affaires ont déjà la pression, mais ne comptent pas se laisser emporter par l'euphorie générale ni par la folle rumeur d'amnistie. Ils comptent jouer serré et favoriser le contre, comme le fait la bande à Lippi. Pour cela, ils comptent sur la rigueur et l'intransigeance de Luigi Agnolin, le fameux arbitre incorruptible devenu un dirigeant hostile à tout compromis. Nos dirigeants du football et nos responsables de clubs doivent voir d'un œil curieux, à l'ère de la «réconciliation» nationale, ce que font nos amis italiens. Ils doivent même se dire qu'ils sont fous ses Romains, comme dirait Astérix le Gaulois. Car chez nous, un titre mondial ou un autre de moindre envergure aurait été l'occasion de non seulement déclarer l'amnistie, mais de dédouaner toutes les dérives, toutes les corruptions, voire dédommager tous ceux qui auraient perdu leurs paris les plus fous. Au pays des tricheurs, le football reste roi et roi du monde pour quatre ans. A moins qu'une éventuelle et sombre affaire de dopage ne vienne nous contredire, vu que les Italiens en sont également des spécialistes. Au pays des tricheurs, le football est roi, mais la justice est surtout là et veille à ce que celui qui triche paye. Même s'il est champion du monde.