Dans l'est de la France, un Lorrain de bonne souche, Robert S., un grand gars solide, athlétique même, a des problèmes : il vient de divorcer et du coup le voilà éloigné de ses trois enfants qu'il aime par-dessus tout. En plus, il a des problèmes d'emploi. Pourtant, c'est un bon plombier, efficace, dur au travail et serviable. Un garçon qu'on imaginerait bien dans la Légion, tête un peu dure comme ceux de sa race, mais bon cœur au fond, bien bâti, ce qui ne gâte rien. Aussi quand, après des mois de recherche et de galère, Robert décroche enfin un travail qui semble sérieux, se réjouit-il de voir que la chance paraît tourner en sa faveur. Les choses s'arrangent... A quarante-quatre ans, il peut à nouveau envisager l'avenir d'un cœur léger. L'espoir revient. Grosse erreur car le destin, en lui proposant ce travail, lui tend un piège qui va se refermer sur lui pour de nombreuses années... Ironie du sort, cruauté des dieux, dirait-on dans une tragédie antique... De la tragédie antique tout d'abord il y a le décor car, loin des brumes de l'Est et de ses sombres forêts, le destin, acharné à perdre Robert, l'attire sur la Côte-d'Azur, sous le soleil méditerranéen qui a vu Phèdre connaître une passion aussi criminelle que mortelle... Pour l'instant, Robert se voit proposer, loin de chez lui, un emploi de plombier dans un grand club de vacances. Le seul inconvénient c'est qu'il doit donc se loger à ses frais. Mais, puisqu'il a perdu son domicile en même temps que femme et enfants, autant se réinstaller dans le Midi. Il boucle sa valise et change d'horizon. Dans son travail, tout le monde n'a qu'à se louer de cette nouvelle recrue. Il va et vient, un «bip» accroché à sa ceinture. Il visse et dévisse, soude, répare, rafistole, bricole à la plus grande satisfaction de ses employeurs. Et les clients du club gardent, eux aussi, un souvenir plaisant de ce bricoleur efficace qui ne regarde jamais sa montre quand on a besoin de lui. Comme en plus, avec ses yeux bleus, ses épaules carrées et sa grosse moustache, il a un charme viril et rustique, il n'est pas long à trouver une consolatrice... En matière de logement Robert, dès son arrivée, s'est renseigné sur les possibilités locales qui pouvaient correspondre avec son nouveau budget. Quelqu'un lui a signalé une logeuse qui pouvait lui offrir une partie meublée de son pavillon. C'est une dame âgée, Mme Angèle, encore très pétulante malgré ses quatre-vingt-quatre ans. Une ancienne antiquaire, une dame très cultivée qui soigne son apparence et conduit elle-même sa petite voiture. Robert se rend à l'adresse indiquée et l'affaire est conclue. Mme Angèle pourtant, en femme de caractère, précise qu'elle entend être chez elle dans toute la maison, qu'elle prétend détenir le libre accès au studio meublé qu'elle consent à lui louer... et, ajoute-t-elle avec un regard appuyé sur les épaules viriles de Robert, qu'il lui est interdit de recevoir chez elle. Recevoir des femmes, cela va sans dire... Robert, trop heureux d'avoir en même temps du travail et un gîte, ne prête guère attention à cette dernière remarque. La vie s'organise. Parfois, notre plombier lorrain rentre un peu tard. A chaque fois, il trouve Mme Angèle encore debout, comme si elle l'attendait. Il prétend cependant, au bout de quelque temps, recevoir la visite d'une jeune femme avec qui il est «du dernier bien». A suivre