Sait-on que le formidable élan de collecte et de traduction des œuvres antiques - prélude au développement de la philosophie et des sciences dans le monde musulman - a pour origine un rêve ? Les sources nous apprennent que le calife abbasside Al-Ma'mun a vu un jour, en rêve, un homme à la peau claire et aux yeux bleus, se tenant devant lui, plein de crainte et de respect. Al-Ma'moun lui a demandé qui il était. «Aristote», lui a-t-il répondu. Al Ma'mun, qui a entendu parler du philosophe grec, engage aussitôt la conversation avec lui. «Qu'est-ce que la beauté ? demande Al-Ma'moun. – Ce qui est beau pour la raison, répond Aristote. – Et qu'est-ce qui est beau pour la raison ? – Ce qui est beau pour la loi ! – Et qu'est-ce que c'est que la loi ? – Ce qu'accepte la majorité ! – Et qu'est-ce que la majorité accepte ? – Il ne faut plus me poser de questions», répond Aristote. Selon une autre version du rêve, celui-ci finit ainsi : «Dis-moi encore quelque chose, demande Al Ma'moun. – Celui qui te donne des conseils sur l'or sera comme l'or pour toi. Professe toujours l'Unité (de Dieu).» Selon plusieurs auteurs musulmans, c'est ce rêve qui va pousser Al-Ma'mun à s'intéresser à la philosophie puis à faire rechercher les manuscrits grecs et à les faire traduire en arabe, pour les lire et permettre aux autres de les lire. C'est ainsi qu'il a envoyé des ambassades chargés de riches présents en territoire byzantin, avec la mission d'acheter les manuscrits que l'Eglise avait entassés dans des coffres en attendant de les détruire. Les Byzantins ont d'abord refusé l'offre d'Al-Ma'mun mais son or les a décidés à changer d'avis.