Tout ce qui brille n'est pas or. Ainsi, des olives noires peuvent être reluisantes non pas pour leur qualité mais parce qu'elles sont traitées avec des produits dangereux. Une belle couleur de l'huile peut aussi être trompeuse parce que celle-ci est parfois mélangée à des huiles de moteur ! «L'Algérie ne produit que 4,5 % de sa consommation annuelle» a déploré Abdelhakim Barrakech, président de la commission chargée des affaires externes et vice-président de l'Association des conservateurs d'olives de Sig, lors d'une conférence de presse animée hier au siège de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (Ugcaa). Le secteur de l'oléiculture accuse un retard de 30 ans, «alors que notre pays était le premier fournisseur de l'Europe», poursuit-il. Les causes de ce retard, d'après l'orateur, s'expliqueraient essentiellement par les conséquences désastreuses induites par la politique de l'économie dirigée que pratiquait l'Algérie pendant plusieurs décennies. Cette politique qui, toujours d'après M Barrakech, en inhibant les initiatives et omettant la plantation des oliviers, a occasionné la stagnation du secteur, sachant que la concurrence mondiale n'offre pas de répit.«Celui qui n'avance pas recule» reprend à bon escient l'orateur. Additionnons à cela le manque d'organisation des acteurs, l'anarchie dans la production, la consommation et l'absence d'un contrôle efficace…, le résultat est une ratatouille (tchektchouka) indigeste qui ne peut que conduire à une incapacité d'arriver à une autosuffisance par rapport à ce fruit (rappelons que l'olive est un fruit) si les choses ne changent pas rapidement. Comme la production locale ne suffit pas à combler les besoins du marché national, il est tout à fait normal de recourir à l‘importation. «95,5 % de notre consommation annuelle est importée. Sachant que le prix d'un kilo d'olive sur le marché international avoisine les 5 dollars», ce qui entraîne la flambée des prix sur le marché national puisque le kg est cédé entre 140 et 200 DA. Toutefois, le programme national de subvention (Pndra) 2001-2006, reconnaît M Berrakech, a permis d'atteindre un chiffre record en matière d'expansion de la surface de culture oléicole (record mondial) puisqu'elle est passée de 152 000 ha en 2001 à 240 000 en 2006, soit un accroissement de 7,23% et table sur 5 millions d'hectares à long terme (dans les 20 années à venir). Cela étant dit, M. Berrakech reproche néanmoins au programme l'insuffisance de la subvention accordée aux oléiculteurs. «3 millions de dinars restent très en dessous des besoins. Il ne faut pas moins de 100 millions de dinars pour atteindre les objectifs ciblés», atteste-t-il. Par ailleurs, les taxes imposées à la profession sont considérées comme excessives «pour les producteurs d'huile, la TVA est à 7%, mais elle est de 17% pour les oléiculteurs», ces derniers trouvent l'imposition trop élevée et demandent une réévaluation. «Nous avons écrit à la direction générale des impôts, au ministère des Finances et nous attendons toujours la réponse.» D'autres problèmes ont été soulevés durant cette conférence, tels que la contrefaçon, la contrebande et le manque de contrôle, ce qui a conduit les intervenants à envisager de créer une Fédération nationale des oléiculteurs afin de poser les problèmes et tenter de réguler le secteur. l La tricherie dans la vente des olives (en particulier l'olive noire) et de l'huile d'olive prend de plus en plus d'ampleur. D'après Rachid Bouziane, directeur de l'entreprise Mitidja de conservation d'huile, certains ne reculent devant rien pour faire des profits sur le dos des citoyens. «Un jour, j'ai remarqué sur une bouteille d'huile mon étiquette alors que l'emballage ne correspondait pas. Ayant effectué des analyses sur le produit, il s'est avéré que le transformateur d'huile avait acquis l'huile pure de mon entreprise et lui a ajouté de l'huile de moteur pour rendre la coloration plus sombre et donner un effet de consistance. Des fois, on constate même que l'huile d'olive commercialisée est mélangée à de l'huile de tournesol avec des proportions qui peuvent atteindre les 80%», dénonce M. Bouziane. L'olive ne déroge pas à la règle, puisque avides de gain rapide et facile aux dépens de toute considération éthique même au risque d'attenter directement à la santé du citoyen, les trafiquants ne s'inquiètent pas des conséquences. Ils recourent à l'utilisation d'un produit toxique (le sulfate de fer ou la soude caustique) pour donner un aspect plus brillant et plus noir à l'olive. «Le procédé d'oxydation de la violette (espèce d'olive) existe bien, mais cela se fait avec du glutamate de fer, un produit alimentaire autorisé par le conseil oléicole international et qui ne présente aucun danger pour la santé du consommateur», précise-t-il. Par ailleurs, la contrebande de l'olive fait beaucoup de mal au marché algérien, «de grosses quantités sont passées illégalement vers les pays limitrophes. Ceci amène inexorablement vers une raréfaction du produit et se répercute fatalement sur le prix de l'olive sur le marché». Revendications l Durant la conférence de presse, M. Berrakech a émis quelques revendications afin de régler les problèmes inhérents à la profession. Ces propositions pourraient se résumer comme suit : faciliter l'accès au foncier agricole et acquisition d'arbres. Renforcer les systèmes d'alimentation en eau, augmenter les subventions et reconsidérer la fiscalité.