Responsabilité n «Je les considère comme mes propres filles. Je ne peux pas les donner au premier venu. Je ne donne mon accord qu'une fois assurée que le mariage assurera leur bonheur.» Le centre de Sidi-Moussa abrite parfois des fêtes de mariage en bonne et due forme avec un couscous, de la zorna, des youyous, des cadeaux et même une… dot. Il arrive, en effet, qu'une femme parmi les pensionnaires convole en justes noces, non pas avec quelque vieux du centre, mais avec une personne de l'extérieur. «Ce sont généralement de jeunes personnes qui désirent marier leur père après le décès de son épouse qui se présentent. Ils font, en fait, d'une pierre deux coups. D'abord, ils trouvent un partenaire qui prendra en charge leur vieux paternel, et ils font en parallèle une bonne action en permettant à une femme, qui n'a personne au monde, de fonder un foyer», explique Mme Si Larbi. Les demandes en mariage se font d'une manière tout à fait normale. Quelqu'un se présente à la direction et demande si parmi les pensionnaires valides une femme ne voudrait pas prendre son père veuf pour époux. Les responsables lui présentent celles qui répondent au profil recherché et un rendez-vous est fixé dans le bureau même de la directrice. Car il faut dire que les gens exigent que la femme soit dans un état physique satisfaisant. Pour des raisons évidentes, les femmes stériles ont particulièrement la cote… Bien entendu, la future mariée est consultée et si le parti qu'on lui propose n'est pas à son goût, nul ne peut la forcer à accepter. Parfois, c'est la directrice qui émet des réserves : «Je les considère comme mes propres filles. Je ne peux pas les donner au premier venu. Je ne donne mon accord qu'une trice de leur rendre visite, un peu comme une mère le ferait pour ses propres filles… Les visites, Mme Si Larbi les rend également aux pensionnaires du centre hospitalisés dans différentes structures de santé. «La réglementation ne nous oblige pas à le faire, mais nous ne pouvons pas ne pas nous inquiéter du sort de nos malades qui, de surcroît, n'ont personne au monde», nous dit-elle. Ce n'est pas sans une réelle émotion qu'elle nous informe qu'un nouveau pensionnaire allait bientôt être amputé d'une jambe… Interrogée sur les raisons de tant de dévouement, la responsable affirme, très émue, que «ceux qui ne sont pas sensibles n'ont rien à faire dans ce milieu, ils doivent changer de métier». Assurer un enterrement digne aux pensionnaires décédés fait également partie des préoccupations des responsables du centre qui dispose d'un carré propre au cimetière de la commune de Sidi-Moussa. Une partie du budget est, d'ailleurs, spécialement réservée à couvrir les frais des enterrements (achat du linceul, du cercueil…).