Ambiance n Au détour de chaque venelle aux multiples rabibochages, Bab El-Oued a ouvert, cette matinée, grandement ses paupières. En ce gracieux jour au soleil scintillant, gâtée par la fine brise marine, les placettes commençaient très tôt à contenir, comme toujours, l'habituelle et bouillonnante marée humaine. Des vieilles, couffin en main, pressent le pas, direction marché Neslon où il n'est pas évident de trouver des haricots verts frais après dix heures. Plus loin, un match de foot est improvisé par des petits sur un terrain vague qui, la nuit, fait office de parking et d'abri de fortune pour les SDF. Au bord de la mer, sur une R'mila immortalisée par Tahia ya didou, on laisse dérouler des centaines de moulinets sans oser lancer des regards curieux aux quelques couples qui, dans leur isolement, se laissent emporter par les rêveries. Parsemés çà et là, cafés et estaminets s'avèrent exigus pour servir tout le monde. Vote ou pas, Basetta, Trois-Horloges, Triolet ne changent jamais de tempo. Cris incessants de badauds, klaxons stridents et sifflets perçants des agents de l'ordre s'apprivoisent. Dans ce tumulte confus mais exquis de tous les jours, les élections trouvent pourtant leur petite «brèche». Au lycée Saïd-Touati, le chef du centre, fier de son «palmarès» fourni d'une trentaine d'élections depuis… 1962, commence à mettre de l'ordre avec ses assesseurs. «On aura du pain sur la planche», nous dira-t-il. Il s'attend à un vote massif. Avant l'entrée en lice des électeurs, des délégués des partis politiques s'assurent que tout marche bien, comme le veut la réglementation. Les premières enveloppes sont glissées dans les urnes. «J'ai le temps jusqu'à 20 heures», nous dit, l'air jovial, un jeune qui, visiblement, ne s'est pas encore décidé à qui va-t-il prêter sa voix. Aux premières heures, la palme revient d'abord aux vieilles femmes, les premières à se lever tôt. Devant une école primaire, non loin de Trois-Horloges, des policiers usent de leurs sifflets pour chasser d'encombrants automobilistes qui cherchent désespérement une place où stationner. On joue aussi au chat et à la souris avec trois adolescents qui, depuis une bonne demi-heure, assomment les neurones avec leur moto Yamaha grosses cylindrées. On veut chasser ces intrus et leur gros ennuis car, nous dit-on, il va falloir, préparer le terrain à un invité de choix qui devait sillonner le tout Bab El-Oued et ses trentaines de bureaux de vote : Son Excellence l'ambassadeur des Etats-Unis d'Amérique. Il sera l'hôte d'un jour dans un quartier où il est difficile aux affiches placardées, autres que celle du Mouloudia de résister aux griffes acérées des petits.