Protestation n Une vingtaine de personnes, victimes de l'affaire des véhicules saisis de Tizi Ouzou, a observé un sit-in hier matin, devant le siège de la direction générale des douanes sise à la rue Ghare Djbilet à Alger. L'affaire des véhicules saisis à Tizi Ouzou en 2004 n'est pas près de connaître son épilogue. Les doubles victimes de cette histoire, arnaqués par les faussaires et malmenés par les pouvoirs publics, ne savent plus où donner de la tête. «J'ai économisé pendant cinq longues années pour pouvoir acheter le véhicule au marché d'El-Harrach. A mon âge, je me retrouve accusé de trafic. Regardez-moi, ai-je l'air d'un trafiquant ?», se plaint El-Hadj Oukal Rabah, 70 ans, la barbe blanche assortie à son «kamis» immaculé. Issad H'cen, une autre victime, n'arrive toujours pas à croire ce qui lui arrive. «Contrairement aux autres, moi je n'ai pas acheté mon véhicule ici en Algérie. Je l'ai acheté en France et je suis rentré par bateau en Algérie. Une fois arrivé au port d'Alger, ma femme s'est dirigée normalement à la caisse du port pour payer les droits de douane. Et maintenant on me dit que le document acquis est un faux», raconte-t-il avec des trémolos dans la voix. Pis encore, lors du procès, l'homme se retrouve condamné à 18 mois de prison avec sursis «sur le document du jugement, on s'est trompé. Au lieu d'écrire 18 mois de prison, il y figure 18 ans et le juge a signé», s'étonne-t-il. «Justice doit être faite. Ce n'est pas la voiture qui m'intéresse, mais la santé de mon mari», intervient la femme de H'Cen. L'homme qui a subi une opération chirurgicale en France est bloqué sur le territoire national. «J'ai déjà raté deux rendez-vous de suivi en France. Sous contrôle judiciaire, je suis obligé de me présenter deux fois par semaine pour signer mon acte de présence aux autorités compétentes.» Vers 11h30, deux représentants des protestataires ont été reçus dans le bâtiment de la direction des douanes par le directeur du contentieux qui essaie de les rassurer que le dossier est à l'étude. «On en a marre de rester ainsi dans le flou. Cela fait des années qu'on nous répète la même chose mais rien n'est fait. On a frappé à toutes les portes, mais rien n'a changé», lance une des personnes reçues par le directeur. Vers 12h 30, le groupe de protestataires a décidé de se rendre au ministère des Finances dans l'espoir de se faire entendre et ainsi de régler leur situation. «Nous sommes prêts à entamer une grève de la faim si les choses ne s'arrangent pas», avertit une victime. Genèse de l'affaire n Rappelons que l'affaire remonte au mois de janvier 2004, quand la brigade économique et sociale a ouvert une enquête sur un véhicule suspect à Tizi Ouzou. Ces investigations ont permis aux enquêteurs de démasquer un véritable réseau de falsification de documents douaniers en l'occurrence, le modèle 846 et le D3. Le réseau démantelé en 2004 comptait parmi ses membres 12 douaniers dont 4 sont en fuite et plus de 1 200 véhicules furent ainsi suspectés dont plus de 120 saisis en majorité dans la wilaya de Tizi Ouzou. Les victimes qui ont acheté des voitures à ce réseau dans les marchés de Tidjelabine (Tizi Ouzou) ou d'El-Harrach (Alger) et même ailleurs avec des récépissés en bonne et due forme, ne savaient pas dans quel sale pétrin elles s'étaient mises. Lors de l'établissement de leur nouvelles cartes grises, d'autres récépissés leur ont été délivrés, une ou deux fois avant d'être mises au pied du mur et de voir leurs véhicules saisis ou immobilisés pour des erreurs qu'elles n'ont pas commises. Quelques-uns ont même été condamnés à la prison avec sursis pour faux et usage de faux. Les véhicules ont fait l'objet d'une tentative de vente aux enchères les 11 et 12 mars 2007. Tentative avortée puisque la mise en vente a été reportée.