Résumé de la 10e partie n La sorcière ne voulant pas se marier au cheik, a simulé la folie et, dans son jeu, elle a prédit la mort du cheik. Depuis tout le monde la respecte et la craint... «Mais il y a huit jours, au clair de lune, alors que j'étais nue dans le bassin, un homme sortit d'une touffe de lauriers roses et m'appela d'une voix basse : «Fatma, Fatma.» «Je reconnus le jeune marabout et je lui ordonnai de se retirer, lui faisant honte de sa conduite. — «Non, dit-il, je ne me retirerai point, car voilà bien longtemps que je te suis et que je t'admire. Sois à moi, je te ferai la plus heureuse des femmes : si tu es touchée par l'esprit de Dieu, ne suis-je pas, moi, de la plus haute noblesse religieuse, descendant de Fatima, la fille du Prophète. Mon père est riche, il te donnera autant d'or que tu le désireras ; il ne fait que mes volontés, car je suis son fils unique. Il est interprète de l'oukil el rey de Bougie et sa haute situation nous permettra de vivre dans le luxe.» «Je frémis de dégoût et de haine en entendant ces paroles : le fils, animé pour moi de la même passion infâme que le père et prêt à l'assouvir ! Je refusai avec énergie, menaçant d'appeler. «Il n'hésita plus alors, sauta dans la fontaine. D'un bond, j'essayai de m'enfuir, en appelant : mais le jeune homme me saisit au bras, me renversa à terre et me serra la gorge pour étouffer mes cris.... «A mes cris de plus en plus faibles, tous les chiens du village étaient accourus : ils arrivaient de toutes parts, glapissant comme des chacals en chasse et lorsqu'ils virent celle qui était si bonne pour eux, terrassée par un misérable, ils se ruèrent sur lui et le forcèrent à lâcher prise. «Bientôt je dus le défendre moi-même et écarter les chiens, car son sang coulait déjà et il aurait été écharpé. — «Ton jour, Si Ali, en lui crachant au visage, n'est pas encore venu, mais prépare-toi, car l'heure du grand voyage ne tardera pas à sonner. Préviens ton père, que je hais plus que toi encore, qu'il n'aura bientôt plus de fils.» «Je rentrai chez moi escortée par la meute de mes libérateurs et de bon matin je fis appeler les frères Hiadaden. «Je leur racontai l'outrage que j'avais dû subir de la part du père et de celle du fils ; je leur dis que j'avais résolu la mort de Si Ali, fils unique et adoré, afin de me venger ; je leur offris tous mes bijoux, pour m'aider à accomplir mon projet. Ils refusèrent mes présents, me déclarant que Si Ali ne passerait pas la semaine ; ils voulaient, eux aussi, punir les misérables qui avaient outragé Leïla Fatma la prophétesse. «Le mardi, ils me prévinrent que le lendemain Si Ali serait mort et qu'ils m'apporteraient la tête. Ils partirent pour le marché de la Smala. «Le matin du mercredi, je rencontrai Si Ali à la Djemaâ où il priait, et devant tous, je lui dis : — «Ô marabout, toi qui as osé outrager Fatma, es-tu prêt ?» — «Oui, répondit-il, sans pâlir. — «Eh bien, dis-je, tu ne verras pas l'aurore de demain !» «Il s'inclina sans répondre, s'absorbant dans sa pieuse occupation. «A la tombée de la nuit, les frères Hiadaden frappèrent à ma porte : ils m'apportaient la tête de Si Ali, à laquelle je fis arracher l'oreille en signe de mépris. (à suivre...)