Dans beaucoup de sociétés, le noir occupe une place de choix dans les croyances superstitieuses et les pratiques magiques. On redoute particulièrement le chat noir, porteur de malheurs et de troubles et le corbeau, annonciateur de mauvaises nouvelles. Ces mêmes animaux, à cause des forces maléfiques qu'ils véhiculent, sont utilisés par les sorciers dans la confection des charmes. Mais par une sorte de magie préventive ou homéopathique, la force du noir est détournée pour combattre les maléfices : les exorcistes sacrifient des animaux noirs pour chasser les mauvais esprits et briser les sortilèges. On sait aussi qu'en Algérie, les mots signifiant «noir» en arabe, lekh'al, lessoued, et le nom de l'esclave noir (loucif en arabe, akli en berbère), sont utilisés comme prénoms pour détourner les mauvais esprits, la maladie et la mort. Le noir n'est donc pas une couleur totalement négative, bien au contraire. De nombreux exemples, anciens et modernes, illustrent cette croyance. Ainsi, les Romains distinguaient, dans leur langage, deux variétés de noir : niger, qui se rapporte au noir brillant (c'est lui qui a donné, en français, le mot «noir») et ater, noir terne, que l'on retrouve, par exemple, dans atrabilaire, c'est-à-dire d'humeur chagrine. Alors que le second terme était négatif, désignant la tristesse et la mélancolie, le second avait, au contraire, un sens positif. L'opposition entre un «noir brillant», positif et un «noir terne», se retrouve en Afrique noire : le beau teint est le noir brillant, alors que le terne est signe de maladie ou de faiblesse.