Vladimir Poutine a fait un pas vers l'apaisement mardi en levant la menace d'une intervention de l'armée russe en Ukraine, avant de se rendre à des pourparlers à Vienne au moment où a été déclaré un fragile cessez-le-feu. Le président ukrainien, soutenu par les Occidentaux, Petro Porochenko, qui doit de son côté s'entretenir mardi à Kiev avec le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a aussitôt salué l'annonce du Kremlin, y voyant un «premier pas concret» vers un règlement de la situation dans l'est du pays. Depuis avril, de violents combats entre les insurgés et l'armée ont fait près de 400 morts et menacent l'unité de l'ancienne république soviétique, après le rattachement de la Crimée à la Russie en mars. Selon l'annonce de son porte-parole, Vladimir Poutine a demandé mardi au Conseil de la Fédération, la chambre haute du Parlement russe, de lever l'autorisation d'intervenir militairement en Ukraine, qu'il avait sollicitée en mars. Cette décision, qui sera entérinée dès mercredi par les parlementaires, a été prise «dans le but de normaliser la situation» en Ukraine, a souligné le porte-parole, Dmitri Peskov. L'autorisation de recours à l'armée, motivée officiellement par la nécessité de défendre les citoyens russes en Ukraine, avait contribué en mars à l'escalade de la tension alors que la Russie avait massé des dizaines de milliers d'hommes pour des manoeuvres près de sa frontière avec ce pays et s'était rattaché la Crimée, une péninsule du sud de l'Ukraine. En annonçant cette décision avant son départ pour Vienne, où il devait rencontrer son homologue Heinz Fischer, le Premier ministre Werner Faymann, et le Suisse Didier Burkhalter, président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (Osce), Vladimir Poutine, menacé de nouvelles sanctions par les Etats-Unis, a repris l'initiative et reporté la pression sur le pouvoir ukrainien, mis en demeure de mettre en oeuvre son plan de paix annoncé la semaine dernière. Lundi, Olexandr Borodaï, le chef de la république autoproclamée séparatiste de Donetsk, l'un des bastions des insurgés pro-russes, avait déjà fait volte-face en annonçant son accord pour un cessez-le-feu jusqu'à vendredi matin et pour l'ouverture de négociations de paix avec les autorités pro-européennes de Kiev. Le président Porochenko avait ordonné vendredi à ses troupes un cessez-le-feu d'une semaine jusqu'au 27 juin pour permettre aux rebelles de désarmer. Mais les insurgés, qui ont revendiqué leur indépendance dans deux régions russophones industrielles de sept millions d'habitants, avaient rejeté ces conditions en estimant qu'il ne s'agissait que d'un «stratagème». Leur annonce-surprise avait renvoyé la balle dans le camp de Petro Porochenko, qui avait jusqu'à présent indiqué qu'il ne discuterait pas avec ceux qui ont «du sang sur les mains». Le président ukrainien n'a jamais nommé directement ceux qu'il ne voulait pas voir à la table des négociations, mais ces commentaires ont été interprétés par Moscou comme une référence aux principaux chefs rebelles pro-russes. Aucun autre chef rebelle n'a cependant fait part de son ralliement à Olexsandr Borodaï et l'armée ukrainienne a rapporté de nouveaux incidents dans la nuit. Le porte-parole des opérations militaires ukrainiennes, Vladislav Selezniov, a indiqué que des hommes armés continuaient d'attaquer des soldats, notamment dans les fiefs rebelles de Donetsk et Slaviansk, sans faire de victimes. Le président Porochenko, élu le 25 mai avec le soutien des Occidentaux, a fait valoir ses conditions inscrites dans le plan de paix et a appelé la Russie à des avancées concrètes lors d'un entretien téléphonique avec le vice-président américain Joe Biden, pour la deuxième fois en 48 heures. Selon un communiqué de la présidence mardi, Petro Porochenko a souligné que le cessez-le-feu devait «s'accompagner de la libération des otages et d'une fermeture de la frontière pour empêcher l'entrée en Ukraine de mercenaires et armes venus de Russie». Kiev et les Occidentaux accusent la Russie d'armer en sous-main la rébellion pour déstabiliser l'Ukraine, qui doit signer vendredi le dernier volet d'un accord historique d'association avec l'Union européenne. Moscou dément ces accusations, et le ministère russe des Affaires étrangères a une nouvelle fois dénoncé mardi dans un communiqué le «parti pris» de l'Union européenne dans cette crise et les accusations «falsifiées» lancées contre la Russie.