L'opération des Israéliens qui a tué six cadres de la résistance du Hezbollah, dont un commandant du groupe libanais, sur le plateau syrien du Golan, une région occupée par Israël, pourrait constituer un tournant dans la guerre froide actuellement en vigueur dans la région depuis 2006. De façon solennelle le Hezbollah a annoncé le raid assassin sur sa chaîne de télévision Al Manar sans parler de riposte. Mais les médias israéliens ne parlent depuis que de la riposte. Les spécialistes estiment que l'attaque pourrait bien changer les «règles» du jeu dans la région. Le raid en question a eu lieu près de Quneitra sur le plateau du Golan. Un lieu on ne peut plus symbolique pour la résistance incarnée par le mouvement libanais Hezbollah. Cette attaque meurtrière d'Israël pourrait constituer l'étincelle pour embraser toute la région déjà fortement ébranlée par les différentes crises qui s'y déroulent. Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, avait annoncé jeudi dernier pour la première fois que son parti possédait des missiles iraniens Fateh-110 capables d'atteindre tout le territoire d'Israël. La résistance contre l'ennemi israélien se tient toujours préparée à toute agression contre le territoire libanais. L'Etat hébreu, jouissant de l'impunité internationale et même du soutien des puissances occidentales, s'est à plusieurs reprise permis des opérations d'agression sur des territoires de pays voisins dont le dernier en date à l'intérieur du territoire syrien. Toujours en état de guerre avec la Syrie, Israël occupe depuis 1967 environ 1 200 kilomètres carrés du plateau du Golan qu'il a annexé. Une occupation de fait mais ne semblant pas contrarier la «communauté internationale». L'attaque de lundi a visé des cadres de la résistance, dont le commandant opérationnel Mohammad Issa, un des responsables du dossier Irak-Syrie, ainsi que Jihad, fils de Imad Moughniyeh un des dirigeants les plus emblématiques de la résistance et architecte de la victoire de 2006. Passé maître dans la lutte contre l'occupant Moughniyeh a été assassiné en 2008 à Damas dans un attentat à la voiture piégée, une attaque comportant la signature des services israéliens. Ainsi Israël ne s'encombre point du droit international en frappant à plusieurs reprises des territoires occupés. La riposte...quand et où ? Le mouvement de la résistance Hezbollah, reste aujourd'hui pratiquement la seule entité capable de gêner Israël dans sa prééminence dans la région. Nasrallah avait estimé dans un entretien donné à la chaîne libanaise Al-Mayadeen que «les raids répétés sur différents objectifs en Syrie constituaient une grave violation». «Toute frappe contre des positions en Syrie vise tout l'axe de la résistance et pas seulement la Syrie», a-t-il averti. Des survols de l'aviation israélienne au dessus des secteurs occupés des Fermes de Chebaa et du plateau du Golan étaient fréquents sans que les tenants du droit international ne s'en offusquent. Les Fermes de Chebaa sont une petite zone également occupée par l'Etat hébreu sur le territoire du Liban. L'armée israélienne continue aussi à violer régulièrement la Ligne bleue, fixée par les Nations unies. Cette ligne a été tracée après le retrait israélien mettant fin en 2000 à 22 ans d'occupation du Sud Liban. Le raid de lundi a fait monter d'un cran les tensions au Liban et dans toute la région. Pour certains spécialistes cette agression israélienne ne pourrait pas rester sans conséquences. Les responsables du Hezbollah n'ont pas commenté publiquement le raid qualifié par la chaîne de télévision, Al-Manar, «d'aventure risquée menaçant la sécurité du Moyen-Orient». Mais aujourd'hui la question reste quand et où ? En effet, cette escalade imposée par un Etat bafouant toutes les règles et les droits internationaux, pourrait faire basculer toute la région. Le Hezbollah se consacrait à la lutte contre l'Etat hébreu, mais le mouvement de résistance libanais est désormais aussi impliqué en Syrie où il assure un lien géostratégique vital pour la Résistance. Ses forces étant ainsi sollicitées, et le Liban très fragilisé par le conflit syrien, le mouvement pourrait se retrouver dans une situation moins confortable qu'en 2006. «Le Hezbollah devra donc trouver une réaction appropriée, qui ne déclenche pas d'hostilités ouvertes», soulignent certains analystes. Le Liban est toujours en guerre avec Israël, qui a occupé le sud du pays pendant 22 ans, jusqu'en 2000 où l'armée de l'Etat hébreu sera boutée hors du pays sous le coup de butoir de la résistance. En 2006, l'Etat hébreu avait livré une agression au Liban faisant plus de 1 200 morts libanais, en majorité des enfants. M. B.