«C'est la responsabilité de l'Etat, et à sa tête le président de la République, de lever tous les obstacles qui se dressent contre tamazight». C'est ce qu'a déclaré, hier samedi, la secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, lors d'un meeting animé à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, et ce, à l'occasion du 35e anniversaire du Printemps amazigh. La patronne du PT, qui était venue réitérer sa revendication de la constitutionnalisation de tamazight comme langue officielle, a présenté à l'occasion de cette rencontre avec le public, la vision de son parti concernant la démarche à suivre en faveur de cette langue. Pour elle, le Haut commissariat à l'Amazighité a montré ses limites et il faudrait créer un secrétariat d'Etat, doté d'une enveloppe conséquente pour s'occuper de la promotion de la langue amazighe. Mais avant cela, Louisa Hanoune a tenu à préciser que sa formation politique revendique la constitutionnalisation de tamazight en tant que langue, et non ses dialectes, comme cela a été le cas pour son statut de langue nationale consacré en 2002. «Les dialectes divisent, mais la langue unit» a-t-elle affirmé, non sans plaider pour un travail scientifique visant la standardisation de la langue amazighe et son enseignement obligatoire sur tout le territoire national. Elle enchaînera sur la nécessité de réformer le système éducatif. Pour l'école, «il faut des efforts gigantesques pour une réforme profonde, et ce n'est pas de la seule responsabilité de la ministre de l'Education, mais de toutes les institutions de l'Etat». Une façon de poser le préalable d'une volonté politique de réformer ce «socle» de la société et de la construction du pays. Une volonté aussi pour des réformes profondes politique, constitutionnelle et institutionnelle, a-t-elle défendu avant d'évoquer la responsabilité du chef de l'Etat dans ces réformes. «Des étapes historiques (la Révolution, le Printemps amazigh, Octobre 1988 et la décennie 1990) ont donné une immunité partielle à l'Algérie contre les troubles qu'on appelle le printemps arabe, concocté dans des laboratoires étrangers», a précisé Louisa Hanoune, ajoutant qu'«il est vrai qu'il n'y a pas eu de processus révolutionnaire en Algérie, parce que les conditions n'étaient pas réunies, mais le président de la République peut ordonner que les doléances des citoyens soient pris en compte dans le processus des réformes». Elle abordera justement ces réformes et la prochaine Constitution pour donner la position de son parti à ce sujet. La réforme de la Constitution n'aura aucun sens si tamazight n'y est pas consacrée langue nationale et officielle au côté de l'arabe, si la séparation des pouvoirs n'est pas officialisée avec une certaine éminence du législatif avec une seule Chambre et si tous les mécanismes de contrôle des dépenses de l'argent public ne sont pas renforcés, a-t-elle, entre autres, décrété. Pour la secrétaire générale du PT, le président de la République n'est pas obligé d'être président du Conseil supérieur de la magistrature qui doit être un magistrat élu par ses pairs. Tout comme il n'est pas obligé d'être ministre de la Défense, mais seulement chef des forces armées. Elle prône également la révocabilité des élus, même à mi-mandat, et la criminalisation de la fraude électorale. Louisa Hanoune s'en prendra dans son intervention au ministre de la Santé et son projet de réforme qu'elle qualifie de «provocation». «Avec cette réforme de la santé, ce sont 15 millions d'Algériens qui seront exclus des soins, puisque ce sera la fin de la gratuité», a-t-elle martelé, considérant le projet comme «un coup de poignard dans le dos de la révolution». L'animatrice du meeting s'attaquera en outre à «l'oligarchie» qui cherche à siphonner et piller le foncier et l'argent public, à affaiblir l'Algérie en revendiquant l'ouverture de tous les secteurs d'activité, y compris ceux de l'énergie et du transport aérien. Le Forum des chefs d'entreprises (FCE) en prendra pour son grade, à l'occasion du meeting de Louisa Hanoune, qui l'accuse de vouloir tuer Sonatrach et Air Algérie et siphonner le foncier industriel et l'argent public. «Ils nous parlent aujourd'hui de partenariat privé-public. Si c'est pour lancer des activités ensemble, ce n'est pas un problème, mais en réalité ils veulent entrer dans le capital des entreprises publiques pour s'en accaparer. C'est une privatisation déguisée», affirme la patronne du PT qui rappelle que ce sont les grandes entreprises publiques qui sont visées, particulièrement celles faisant partie du FCE. Tout en précisant qu'elle n'a aucun problème avec le secteur privé, mais avec cette oligarchie, incompatible avec la démocratie et pouvant apporter le totalitarisme, Louisa Hanoune défendra l'idée de «couper le cordon ombilical entre les entreprises publiques et l'oligarchie» et de faire le ménage dans le gouvernement, notamment les ministres qui jouent le jeu de cette oligarchie. M. B.