Un colloque scientifique sera consacré à la mi-mai prochain à l'un des illustres maîtres de la chanson chaabie, en l'occurrence cheikh El Hasnaoui, décédé il y a près de 7 ans dans la lointaine et minuscule île de la Réunion, dans l'océan indien, à quelque 10 000 kilomètres de son pays natal, l'Algérie. Organisée à l'initiative de l'Association Issegman (les bourgeons) de Tizi Ouzou, cette manifestation a pour objectif principal de faire redécouvrir ce géant de la chanson de l'exil, dont les textes ont bercé des générations entières avec ses mélodies langoureuses. Les conférences, qui seront données au cours de ce colloque, aborderont à travers des thèmes centrés sur l'homme et son œuvre. Cheikh El Hasnaoui a légué à la postérité un répertoire de 48 hansons, dont 33 en kabyle et 15 autres en arabe dialectal, dont les immortels tubes Maison blanche et Ya n'djoum ellil. Ses chansons sont inspirées, pour la plupart, des amertumes de l'exil, mais elles sont aussi des hymnes à la liberté, à la femme et à l'amitié. Homme de sagesse, il disait dans sa chanson Rod balek (méfies-toi) : «Ô homme avisé, prends garde. Les temps sont perfides, et l'ami si rare. Méfies-toi, il t'en fera voir». De son vrai nom, Khellouati Mohamed, le cheikh naquit le 23 juillet 1910 au village Tadart Tamuqrant accroché aux piémonts sud de la ville de Tizi Ouzou. Dès son jeune âge, il quitte son village, suite, dit-on, à un chagrin d'amour, pour s'installer à Alger. C'est à Alger qu'il perfectionna son art au contact des ténors du chaabi, tels Mustapha Nador, Hadj M'hamed El Anka et Cheikh Tahtaha. C'est vers la fin des années 1930 qu'il se rendit en France où il a décidé de s'exiler. Il resta dans l'Hexagone jusqu'en 1985, avant de décider d'aller voguer sur l'océan Indien en mettant le cap sur l'île de la Réunion où il s'établira et y jusqu'à sa mort, le 23 juillet 2002. «Le jour où je m'en irai, ce sera comme une fourmi ailée, ‘avarriq', qui s'envole une seule fois dans sa vie, car en perdant ses ailes définitivement, elle ne pourra jamais revenir à la fourmilière», aurait-il confié à un ami d'enfance. Mythe ou réalité, cette prémonition s'est, en tout cas, réalisée puisqu'il mourra, nonagénaire, loin des siens. Aussi, ses nombreux adeptes souhaitent que ses restes soient rapatriés dans son pays natal.