Le spectaculaire a bel et bien pris le pas sur le fond au sommet du G20 réuni pour deux jours depuis hier dans la ville portuaire allemande de Hambourg. N'étant ni une instance ni une organisation internationale formelle, le Groupe des 20 pays les plus industrialisés et de quelques Etats émergents n'en représente pas moins 85% de l'économie mondiale et deux tiers de la population mondiale. C'est dire le poids qui devrait normalement être le sien. En dépit de son importance incontestable, les observateurs et analystes dans leur majorité ont une approche pessimiste du grand conclave. Sérieusement «parasitée» par la présence massive des groupuscules anarchistes et d'extrême gauche, ennemis irréductibles du capitalisme financier et ne répugnant pas au recours à la plus extrême des violences, la réunion a connu un déplacement de son centre d'intérêt avant même son ouverture. Les images d'Hambourg transformée en champ de bataille et les panaches de fumée noire dans le ciel de la ville ont donc dominé la couverture médiatique de l'événement. Pour beaucoup de médias, la messe est dite d'avance et les «grands» de ce monde, en dehors d'une non-gouvernance mondiale durable qui les plombe, ne pourront offrir rien d'autre. Créé dans les années 2000 pour freiner une involution économique et financière menaçant sérieusement l'état du monde, le G20, pour l'essentiel, n'est pas parvenu à donner corps à ses principaux engagements. Il a bien mis en place une stratégie de mobilisation des fonds pour redonner du tonus à des économies en berne. Mais la manne semble avoir davantage profité aux banques qu'aux secteurs affectés de l'économie réelle. On ne s'étonnera pas, dans ces conditions, de voir le champ des manœuvres investi par les rivalités clivantes des vieux blocs en résurgence : Trump et Poutine vont se rencontrer pour la première fois depuis l'élection du 45e président américain et Angela Merkel, «l'homme fort» de l'Europe, promet de tenir la dragée haute au locataire de la Maison Blanche. Ce dernier s'y est préparé en conséquence. Son crochet par Varsovie, avant d'atterrir à Hambourg, a pris la forme d'un croche-pied à ses «alliés» européens. En Pologne, il encourage la défiance des dirigeants du pays contre l'UE, en particulier sur le refus d'accueillir des migrants chassés par les guerres. Il fallait s'y attendre, Donald Trump profite de son voyage européen pour rajouter des brandons à la discorde qu'il veut entretenir avec la Russie de Poutine sommée de cesser son soutien aux régimes syrien et iranien. Au final, se pose une question de fond : les grandes rencontres internationales servent-elles encore à quelque chose ? Les tensions sur le G20 de Hambourg ne sont-elles pas un symptôme visible d'une grande panne de la gouvernance mondiale ? Il est peut-être temps de dépasser le multilatéralisme né de La Deuxième guerre mondiale et d'envisager la mise en place de nouveaux instruments mieux adaptés aux nouvelles réalités de la planète. A. S.