Que les méritants lauréats du baccalauréat millésime 2017 ne voient dans ce titre d'inspiration asinienne aucune marque de mépris pour le parchemin qui leur a donné tant de sueurs froides et d'angoisse. Peau d'âne est d'abord une histoire d'un célèbre conteur français du 17e siècle, Charles Perrault pour ne pas le nommer. Et comme toutes les histoires racontées au coin du feu, celle du brave mulet qui prêta sa peau au conte se termine plutôt bien : la jeune et ravissante princesse épousa le jeune et beau prince, ce qui évita à celle-ci un choix immoral et douloureux, qu'elle devait faire sous peine de mourir. Le Bac algérien, qui sera revenu de loin s'il survit aux complots et guerres menés contre lui depuis l'indépendance en 1962, ne retrouvera son prestige qu'au prix de réformes structurelles et anti démagogiques qui devront concerner tous les paliers du système éducatif. La charge de travail, pour ce faire, aura toujours quelque chose d'asinien, à commencer par le nom : l'ânée, cette quantité de produits ou marchandises posée sur le dos de l'animal et maintenue en équilibre par le bât de deux couffins qui se neutralisent à l'horizontale. Si l'ânée est déséquilibrée, tout part en java, disent les anciens. La «Rekba» (charge) doit alors être entièrement descendue et remontée d'aplomb sur la bête Sauf erreur de notre part, on a cru comprendre dans les premières appréciations du Bac 2017 de la ministre de l'Education nationale, une intention - à moins que ce ne soit une volonté- d'engager des réformes trop longtemps retardées et qui, désormais, s'imposent comme un sérum de survie au chevet d'un agonisant. Le choix est d'une binarité confinant au simplisme : ou l'école algérienne est réformée, par une (re)mise au niveau des standards de qualité qui ne lui sont pas étrangers, ou elle continue à former des cohortes de diplômés dont les «peaux d'âne» ne sont reconnues que par quelques universités étrangères sans renom ni production digne de ce nom. Une zone d'ombre, cependant, dans une déclaration de la ministre. Elle est relative à une donnée statistique des résultats par filière et qui n'est pas sans susciter quelque appréhension. Pour ne pas dire ambiguïté. Mme Benghabrit a en effet affirmé que la filière des mathématiques vient en première position avec un taux de réussite de 68,70% exprimant «la satisfaction du secteur» quant aux résultats de cette branche scientifique qui «attire désormais de plus en plus d'élèves». Ça y est, l'option scientifique, technique et technologique de l'école algérienne a-t-elle commencé à bourgeonner ? Pas de précipitation, car rien n'est moins sûr. Ce pourcentage de 68,70% est un vrai casse-tête. 68,70%, par rapport à combien de candidats ? La ministre ne le dit pas, se contentant d'exprimer «la satisfaction du secteur». En 2016, les candidats de la filière Mathématiques étaient 60 000. Ils avaient, là aussi, enregistré les meilleurs résultats, mais par rapport à une soixantaine de milliers de postulants. Ce qui était loin de tout signe confirmatif de l'option scientifique de l'université algérienne. La réforme sera difficile, les mêmes milieux et esprits de l'arrière qui ont avili et disqualifié l'école algérienne attendent au tournant la ministre sur cette question. Avec les salaires, c'est la seule qui les motive. Toute réforme sera combat. Et tant qu'il n'est pas mené, ce combat n'est ni gagné ni perdu. Il est juste reporté. A. S.