Les Algériens auront sans doute remarqué que rarement le thème de la réconciliation n'a autant revêtu d'importance aux yeux des formations politiques, des hommes qui les représentent, tant ceux réputés proches du pouvoir que ceux réputés appartenant à l'opposition. La réconciliation divise et rapproche, mais, heureusement, rapproche plus qu'elle ne divise et, pour cause, les résultats nés dès l'ébauche du concept parti, il y a une dizaine d'années, d'une concorde civile balbutiante à une réalité nationale qui est d'une Algérie de la fin du troisième millénaire à celle du deuxième ce qu'est le jour à la nuit.Certains parmi les opposants à la main tendue présidentielle à une partie des enfants du pays qui ont pris les armes pour des raisons que l'histoire jugera, ont été plus lucides que d'autres et après avoir, sans doute, non sans sincère conviction, dénoncé et rejeté ce qu'ils considéraient comme un deal compromettant, sont revenus avec lucidité sur la nécessité d'une réconciliation nationale, passage obligé au retour définitif de la sérénité et ont, par voie de conséquence, estimé qu'il fallait, sans qu'il y ait besoin d'en faire leur credo essentiel, en parler sans rougir. S'en revendiquer n'était pas forcément un reniement ni une violence à des principes prématurément clamés immuables. Tout cela, bien évidemment, a sa réponse dans les dividendes (retour de la paix, redémarrage de l'économie, retour des investisseurs étrangers, embellie financière incomparable depuis l'indépendance, stabilité des institutions nationales, cohérence politique) engrangés par le pays depuis que le peuple l'a approuvée par voie référendaire. En fait, les chefs de file des partis politiques, qu'ils soient en lice à l'élection présidentielle ou non, s'en sont gardés, pour une raison ou pour une autre, ou tout simplement y sont opposés pour des raisons sur lesquelles il n'est pas besoin de revenir, ont saisi la portée d'une mission dont la charge émotionnelle n'est surtout pas négligeable et à négliger, en ce sens que la question de la réconciliation nationale n'est pas l'apanage de notre seul pays mais de bien d'autres à travers le monde, même si les modes et les modèles ne se ressemblent pas. Pour faire face à la crise de confiance générale, à la morosité politique nationale et à la crise financière mondiale, Obama et Sarkozy n'ont pas hésité à faire appel aux hommes politiques de l'opposition pour leur confier les missions les plus importantes engageant leurs pays respectifs. L'objectif étant clair : la consolidation d'un Etat fort de ses hommes face aux turpitudes conjoncturelles de toute nature pour dépasser toutes les divergences. La politique de la main tendue, qu'elle le soit par nécessité ou par obligation, ne minimise pas son promoteur ; bien au contraire, elle le magnifie d'autant qu'il s'agit de celle du vainqueur au vaincu. Pour l'Algérie, il ne s'agit pas de départager un camp ou un autre, mais de souligner que la démarche politique de Bouteflika a abouti en un temps record, alors que, pendant dix années de violences partagées, nul n'a prédit sa fin salutaire. Parler de disparus et surtout reconnaître que l'Etat a ses responsabilités, pourquoi pas ? Aider des familles de terroristes ou qui n'ont rien à voir avec le drame, pourquoi pas ? Réintégrer ou indemniser des travailleurs impliqués dans la tragédie nationale par leurs activités, pourquoi pas ? La consolidation de l'Etat de droit ne peut aboutir que de cette manière et c'est pour cette raison que sa construction ne peut être qu'approfondie, encore et encore. Cela, les responsables politiques «intéressés» en ont bien saisi la portée et l'importance et le reste des candidats en ont fait l'un de leurs thèmes majeurs dans leur campagne. A. L.