Louis Aragon n'avait pas tout à fait raison. La femme n'est pas l'avenir politique de l'homme en… Algérie. Comme toute arithmétique froide, les statistiques au sujet de la représentation politique féminine font l'effet d'une douche glaciale. Il y a actuellement 3 ministres femmes au gouvernement, 30 députées et 5 sénatrices. Encore faudrait-il modérer ces chiffres. Les pondérer par rapport à la proportion de femmes, légèrement majoritaires dans le pays, dans l'enseignement, l'administration, la justice et l'économie. Dure loi de la relativité : sur les trois ministres, seule Khalida Messaoudi n'est pas une sous-ministre. Quant aux députées et sénatrices, leur nombre est à apprécier en proportion par rapport aux chiffres respectifs de 389 et 144 représentants. La proportion, dérisoire, est, par exemple, inférieure au pourcentage de représentation de femmes dans les assemblées élues au Maroc, qui est de 10,6%. Les chiffres sont toujours implacables : sur 21 partis à l'APN, 9 ont une représentation féminine, notamment le FLN et le Parti des travailleurs (PT) qui totalisent à eux deux 11 députées. Dans la relativité, c'est mieux que l'Egypte avec son pitoyable 2%. Encore mieux que l'Arabie saoudite où les femmes, qui n'ont pas le droit de voter, ont tout de même vu une des leurs accéder au gouvernement. Comme au royaume du «déchdèche», en Algérie, pays du «qamis» et du «chèche», les Algériennes peinent à se frayer une voie gratifiante dans la société, encore moins en politique. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à considérer le cas du RCD, parti s'affichant moderniste. Au secrétariat national, qui compte 16 membres, il y a une seule femme, alors que le parti ne compte par ailleurs qu'une députée. Cherchez l'anomalie démocratique… En comparaison, l'islamiste MSP compte, lui, deux femmes dans sa direction de 18 membres. Ces chiffres éclairent aujourd'hui, a giorno, la question de la représentation politique des femmes. Et, tout particulièrement, celle de leur accès à la sphère de prise de décision. De ce point de vue, les femmes n'ont jamais accédé à des ministères régaliens, dits de «souveraineté». Une femme, un jour, Premier ministre ou président de la République, cela reste encore un rêve sur papier glacé. Pourtant, des Benazir Bhutto, il n'y en a pas seulement au PT. Mais, culture religieuse, mœurs politiques et conservatisme social obligent, les Algériennes représentent toujours une minorité visible bien invisible. Louisa Hanoune, femme d'Etat et présidentiable, constitue une belle exception. Pourtant, sur le papier, presque toutes les conditions sont réunies pour permettre aux femmes de percer. Les aider à démolir le mur du machisme et briser le plafond de verre du conservatisme faisant qu'elles ne soient pas la «moitié de l'homme». Les filles d'Eve, en nombre et en qualité, existent. L'Algérie a ratifié presque toutes les conventions internationales de promotion féminine et son chef de l'Etat a gravé la question de la représentation politique dans le marbre de la Constitution. Faut-il alors être plus volontariste encore en rendant obligatoire les quotas ? Mettre les femmes en nombre suffisant et en position d'éligibilité sur les listes des partis ? Subordonner les subventions étatiques au nombre de femmes éligibles sur les listes électorales ? Autant de questions posées au futur président de la République. N. K.