«En ce jour [hier, ndlr], un nombre d'actions sont cédées au FLN, au RND, au MSP […] Les institutions sont devenues des lieux où se côtoient les affairistes, les milliardaires et où s'exerce le renforcement du pouvoir sans aucune légitimité. Les élus achètent et vendent des voix au moment où le reste des Algériens est soucieux de son quotidien et que la vie politique est caractérisée par une répression.» C'est ainsi qu'a commenté hier le premier secrétaire national du Front des forces socialistes (FFS), Karim Tabbou, le scrutin relatif au renouvellement partiel du Conseil de la nation. Cette élection, rappelons-le, devait se dérouler précisément hier et ce n'est pas fortuitement que le FFS a choisi de faire coïncider cette activité politique avec la conférence thématique qu'il a organisée en son siège national. Il s'agit de la seconde édition du «Forum des maires et des élus FFS», en présence de ces derniers. Une opportunité pour Karim Tabbou de rappeler, dans son discours inaugural de la rencontre, qu'il est «important aujourd'hui de parler des contraintes de la gestion locale», tout en rappelant la dernière décision des autorités de soumettre tout déplacement des élus en dehors du territoire national à une autorisation du ministère de l'Intérieur. «La veille, l'Algérie, qui prenait part aux travaux de la rencontre des ministres de l'Intérieur des 5+5, se félicitait des décisions relatives à la libre circulation, ce qui dénote la prévalence du double discours chez nos dirigeants», note l'intervenant. «Il est question de la révision du code communal. Dans les faits, l'élu se voit dépouillé de toutes ses prérogatives tant l'administration exerce un contrôle quasi total sur ses activités […] Les élus FFS accomplissent leurs activités dans des conditions difficiles mais avec la participation de la population, il est possible de changer les choses», ajoutera-t-il avant de rappeler que le FFS compte parmi ses élus des syndicalistes et des animateurs du mouvement associatif. Pour animer ce forum, le FFS a fait appel au Dr Essaïd Taïb, professeur d'enseignement supérieur, qui a choisi d'intervenir sur le thème de «la liberté d'association en Algérie». Une des libertés fondamentales et un droit consacré dans la Constitution mais que les faits ne garantissent pas, relève d'emblée le conférencier. Il a entamé son exposé par un historique du mouvement associatif en Algérie, lequel avait commencé à exister dès 1901 avant de perdurer durant la guerre de libération nationale avec la naissance des scouts musulmans, du Croissant-Rouge algérien, de l'Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA)… Depuis 1962, fait remarquer le Dr Taïb, l'activité associative a été soumise à la «restriction législative» et à la «surveillance administrative». Une attitude qui a continué y compris avec l'avènement de la Constitution de 1989, celle de 1976 ayant soumis la liberté d'association au respect de la loi, ce qui pouvait ouvrir la voie aux multiples restrictions. «Contrairement à ce que l'on pense, ce n'est pas la loi de 1990, laquelle avait supprimé l'autorisation préalable du ministère concerné par l'activité, qui a libéré le mouvement associatif. Ce sont les événements de la décennie 80 qui ont fait que des associations soient tolérées de fait», explique le conférencier. Il cite les événements du Printemps berbère, les revendications féministes, l'émergence des islamistes… Pour le Dr TaÏb, c'est le régime préventif qui régit le mouvement associatif alors que le régime répressif, contrairement à ce que pourrait suggérer son appellation, est plus favorable à la liberté d'association dans la mesure où ce n'est pas l'administration qui en valide la création mais le juge. L'intervenant situe cet interventionnisme administratif au niveau lexique en ce sens que le terme consacré, «déclaration», est faussé dès lors qu'il est exigé en réalité un agrément. Et de revenir sur les autres contraintes qui empêchent le mouvement associatif d'évoluer, sur le plan de la constitution du dossier, de la désignation de l'objectif, du délai d'examen de celui-ci… Ce qui constitue une atteinte à tout le processus démocratique de la société, conclut-il. M. C.