Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Aïn Defla Madani Azzeddine Ce serait faire preuve d'un manque flagrant d'objectivité, d'impartialité et d'honnêteté que de ne pas reconnaître que de nombreuses personnes ne font plus confiance à notre système de santé, lequel, d'après eux, ne semble plus en mesure de s'occuper convenablement de la préservation de la santé des individus.Les différentes réformes engagées depuis un certain temps n'ont pas apporté le mieux que tout le monde attendait, selon de nombreux praticiens et citoyens. Les réformes n'ont opéré qu'une réorganisation administrative qui n'a aucunement influé sur la qualité des soins. La formation du personnel médical souffre toujours de lacunes et le départ de l'élite continue d'appauvrir le corps médical. Selon des médecins, de nombreux patients préfèrent rester chez eux plutôt que de se faire soigner dans des hôpitaux ne répondant pas aux normes, ne disposant pas de moyens ou ne fonctionnant qu'avec un personnel débutant. C'est peut-être pour cela que certains préfèrent appeler ces hôpitaux des mouroirs, d'autant qu'ils ne permettent même pas d'atténuer la douleur de certains malades. Aujourd'hui, il faut reconnaître qu'il est rare de trouver un citoyen satisfait du secteur de la santé, auquel, pourtant, l'Etat accorde régulièrement des enveloppes financières colossales pour assurer son développement. Les services des urgences, comme leur nom l'indique, ont un rôle important à jouer pour sauver des vies humaines mais sur le terrain ils sont encore loin de jouer ce rôle d'autant, qu'en plus du matériel qui manque, on enregistre l'absence de médecins formés pour ce genre de soins. De nombreuses personnes décèdent à cause d'une hésitation dans la prise de décision concernant le traitement d'urgence. Ce constat est général à travers le pays, et la wilaya de Aïn Defla souffre également de cette situation puisque de nombreux citoyens ont trouvé la mort à cause du manque de matériel, de l'incompétence d'un médecin traitant ou d'une erreur médicale. L'acquisition de certains types de matériels n'a pas beaucoup amélioré la qualité des prestations vu le manque de formation du personnel. Le recours au privé est devenu l'unique moyen de se faire traiter rapidement. Cependant, les cliniques reconnues sont situées dans les grandes villes telles que Blida, Alger et Oran, ce qui pousse à effectuer de longs déplacements pour consulter et se faire soigner. Selon certains médecins, le salaire actuel n'encourage pas à fournir plus d'efforts. Il ne permet pas non plus d'acheter des ouvrages médicaux pour le perfectionnement. Les médecins eux-mêmes ne sont pas satisfaits de leur secteur et attendent une amélioration rapide par des réformes faciles à concrétiser et qui peuvent apporter un plus. Ils estiment qu'il reste beaucoup à faire d'autant qu'il n'existe pas de motivation dans l'exercice de leur fonction à cause des pratiques de l'administration et de sa manière de gérer les établissements de santé, hôpitaux ou structures de proximité. Mohamed, fonctionnaire dans un autre secteur, voit qu'au niveau des hôpitaux les prestations sont réduites. Il a d'ailleurs été obligé de transférer son fils souffrant de douleurs au ventre vers un radiologue privé après être passé aux urgences où on ne lui a prodigué aucun palliatif. Le radiologue a diagnostiqué une appendicite aiguë qui nécessitait une intervention chirurgicale d'urgence. Heureusement, celle-ci s'est déroulée dans de bonnes conditions et l'enfant a pu rejoindre son domicile quelques jours après. Par ailleurs, le manque de personnel complique l'organisation des permanences au niveau des structures d'urgence ou de consultation. Cette situation provoque une charge de travail supplémentaire pour les médecins et les paramédicaux. Pour ces derniers, ce n'est pas une question d'argent mais il faut un temps de récupération afin d'éviter de commettre des erreurs médicales, qui peuvent être fatales. Toutefois, la question des salaires n'est pas pour autant écartée. De nombreux médecins généralistes et spécialistes estiment que leur salaire est insignifiant. Amine, un jeune médecin dira que «ce n'est pas normal qu'on nous donne ce salaire alors que c'est nous qui passons le plus d'années dans les études». «Certains de mes camarades ont choisi de faire une autre discipline. Ils gagnent aujourd'hui beaucoup plus que moi», dira-t-il pour soutenir son propos avant d'ajouter que «les médecins ne jouissent plus de considération dans notre pays depuis un certain temps». Pour Kamel, un autre médecin hospitalier, «la qualité des soins est en perpétuelle détérioration. Pour preuve, la majorité des hauts responsables et cadres de l'Etat algérien préfère se faire soigner à l'étranger», soutient-il. En somme, dans cette wilaya, il reste encore beaucoup à faire pour assurer une couverture sanitaire adéquate pour l'ensemble de la population. Des citoyens sont obligés d'effectuer de longs déplacements pour se faire examiner convenablement et c'est à cause de cela que les habitants du milieu rural continuent de se faire soigner traditionnellement. Concernant les analyses médicales, certains types d'analyses ne sont pas effectués ce qui pousse à s'orienter vers le privé. Même chose pour certaines interventions chirurgicales. L'ouverture de cliniques privées et de laboratoires d'analyses vient assurer des soins qui parfois n'existent pas dans les hôpitaux. Le secteur de la santé à Aïn Defla ou ailleurs a besoin de plus de planification et d'organisation pour jouer convenablement son rôle.